Les secrets du punk et des Sex Pistols dans « Pistol », racontés par sa costumière - Bobine

15 min
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Les secrets du punk et des Sex Pistols dans « Pistol », racontés par sa costumière - Bobine

15 min
Publié le : 2 octobre 2022Mis à jour le : 2 octobre 2022

Parfois décrite comme la plus grande arnaque du siècle, l'histoire du groupe britannique Sex Pistols est étroitement liée à celle de la créatrice de mode Vivienne Westwood. Disponible sur Disney + et réalisée par Danny Boyle, la mini-série « Pistol » revient sur la naissance du groupe phare du punk anglais. Entre fiction et réalité, décryptage de style en compagnie de la costumière Liza Bracey.

(Crédit photo de couverture : les Sex Pistols dans « Pistol », 2022 - Photo : Miya Mizuno / FX Networks)

Le regard des costumières dans les séries vous intéresse ? Deux épisodes ont déjà été publiés. L'un avec la costumière de la série « Peaky Blinders » et l'autre avec la costumière de « Better call Saul ».

4 Juin 1976, Manchester. Les Sex Pistols se produisent au Lesser Free Trade Hall devant une foule clairsemée. La légende raconte que parmi les badauds venus découvrir ce groupe alors balbutiant se trouvent quelques unes des futures icônes du rock anglais parmi lesquelles Peter Hook et Bernard Sumner (Joy Division, New Order) ou bien encore Mark E. Smith (The Fall). Le concert lui-même est organisé par Pete Shelley (Buzzcocks) et Howard Devoto (Buzzcocks, Magazine).

Cette histoire illustre à elle seule l'influence des Sex Pistols et du mouvement punk en général sur la musique et la société anglaise alors en pleine dépression. Peu importe que vous sachiez chanter ou jouer de votre instrument du moment que vous avez quelque chose de différent à transmettre : une urgence, un style, une attitude, une énergie et bien sûr quelques bonnes chansons.

Les Sex Pistols, c'est un groupe londonien formé en 1975 autour de Steve Jones, Paul Cook, John Lydon dit Johnny Rotten et Glen Matlock - ce dernier sera remplacé en 1977 par le tristement légendaire Sid Vicious. Le manager du groupe Malcom McLaren gère alors avec sa compagne Vivienne Westwood une boutique de vêtements et accessoires baptisée Sex.

« Pistol » est une mini-série de 6 épisodes crée par Craig Pierce et commandée par la chaîne FX au début de l'année 2021. Initialement diffusée en mai 2022 sur FX, la série est désormais disponible sur Disney +. Elle raconte l'histoire des Sex Pistols et s'inspire du livre « Lonely Boy : Tales from a Sex Pistol » d'un de ses membres fondateurs, Steve Jones.

Derrière la caméra : Danny Boyle, le réalisateur de films comme « Trainspotting » ou « Slumdog Millionaire ». Si vous êtes familiers de son travail, vous y reconnaîtrez sans doute sa patte de style. Au casting : Toby Wallace, Anson Boon, Maisie Williams, Thomas Brodie-Sangster ou bien encore Sydney Chandler.

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© Richard E. Aaron/Redferns/Getty Images

Les Sex Pistols en 1978 : Johnny Rotten, Sid Vicious, Steve Jones et Paul Cook (de gauche à droite).

1. Les Sex Pistols, le métier de costumière et l'éthique punk dans le vêtement.

31 Aout 2022. Liza Bracey, la costumière de la série « Pistol », me reçoit depuis Londres via Skype. Sa carrière au cinéma et à la télévision débute à la toute fin des années 90. Depuis, elle a travaillé sur des films comme « Spike Island » de Mat Whitecross en 2012?Il y est question d'une des innombrables légendes musicales de Manchester : The Stone Roses ou « Yesterday » de Danny Boyle en 2019 mais aussi sur des séries comme « Pennyworth » depuis 2019, « Fortitude » en 2015 ou bien encore « Trust » en 2018. Liza Bracey retrouve sur cette dernière série la direction de Danny Boyle, avec qui elle a d'une certaine manière débuté au cinéma?Le court-métrage « Alien Love Triangle », tourné en 1999 et dévoilé pour la première fois près de 10 ans plus tard. - elle détaille son expérience de travail sur ces costumes ici, en vidéo.

Un des principaux attraits de la série « Pistol », c'est l'ambiance qu'elle parvient à recréer autour de la naissance des Sex Pistols : les tenues, le style, l'atmosphère électrique. Mais plus encore que la musique, c'est sans doute les costumes de Liza Bracey et de son équipe qui permettent le mieux de se replonger dans cette époque charnière du rock anglais. Comment Liza est-elle devenue costumière et quel est son rapport avec l'univers des Sex Pistols ? Elle nous raconte.

« Lorsque j’étais enfant, ma mère connaissait une personne qui faisait des costumes. J‘ai donc su très tôt que ce métier existait. Je m’intéressais à la mode mais je ne souhaitais pas particulièrement m’orienter vers les costumes de cinéma.

Il se trouve que Vivienne Westwood était une de mes influences lorsque j’étais plus jeune. Elle faisait par exemple des corsets, or je voulais de mon côté apprendre à en faire. J’ai donc suivi des cours, qui apprenaient non seulement à faire des corsets mais aussi plus généralement des costumes. »

« Lorsque les Sex Pistols sont apparus à la fin des années 70, j’étais un peu plus jeune que Danny Boyle, qui était déjà un adolescent à cette époque. C’était d’ailleurs le cas d’un grand nombre de personnes dans l’équipe. Mais j’aimais le groupe. J’aime aussi ce qu'a fait John Lydon par la suite avec Public Image. Il a été très négatif vis à vis de la série mais après tout il se devait de l’être : c’est son job d’une certaine manière. John Lydon est un très grand artiste, en opposition avec tout, tout le temps. C’est entre autres ce qui a fait les Sex Pistols, puis P.I.L.?Public Image Limited. »

« Le punk m’a en tout cas toujours intéressé : ça a été un tel changement ! Il s’est de fait passé beaucoup choses en Angleterre avec l’arrivée des Sex Pistols. Je me souviens du jour où ma mère est rentrée avec le single de « God Save The Queen » . Ça m’a beaucoup influencé.

Plus tard, lorsque ils sont devenus un peu plus commerciaux, quelqu’un m’a offert le single « Rock around the clock » sorti en 1979 alors que le groupe n'existe déjà plus. Il y avait une photo d’une carte American Express au dos. Le single a été banni du marché parce que le groupe n’avait pas le droit d’utiliser cette image. Je dois tout de même avouer que les Sex Pistols me faisaient un petit peu peur. J’étais jeune et ne serait-ce que l’idée de les voir sur scène avait quelque chose de vraiment terrifiant. Par contre, j’adorais leur style et leurs vêtements. »

« Enfant, j’avais de l’argent de poche pour m’acheter des vêtements. Mais on n’est jamais bien riche à cet âge. Donc le côté Do It Yourself et fait maison du punk me parlait beaucoup. Aujourd’hui, on parle beaucoup de vintage et de seconde main. C’est une pratique d’achat plus durable que le modèle qui consiste à acheter une nouvelle pièce chaque semaine puis à les jeter à la décharge par lassitude ou effet de mode passé. S’approprier son style, regarder du côté de la seconde main ou fabriquer ses propres vêtements permet d’être plus créatif.

De mon côté, je pense que la mode a principalement été créative pour les marques. Elles produisent, on se contente de consommer leurs produits. De nos jours, certaines personnes semblent cependant plus impliquées dans leur approche du style. Elles pensent davantage à se différencier, voire à faire par elles-mêmes. C’est plus personnel, ce qui d’une certaine manière se rapproche de l’éthique punk. »

2. Les costumes de la série « Pistol » : au plus près de la réalité

Que l'histoire des Sex Pistols se raconte aujourd'hui en série chez Disney a quelque chose de tout à fait surréaliste : de 1975 à 1978, la brève carrière du groupe est parsemée de chaos, de drames et d'excès en tous genres. Leur unique album sorti en 1977 s'intitule « Never Mind The Bollocks », tout un programme.

On a parfois réduit les Sex Pistols à des marionnettes pilotées par Malcom McLaren : si le style vestimentaire doit beaucoup aux créations du couple McLaren/Westwood, c'est enterrer un peu vite les impulsions créatives d'un Johnny Rotten par exemple. Comment Liza Bracey a-t-elle recroisé la route de Danny Boyle et composé avec l'héritage stylistique du punk ? Contre toute attente, les costumes de la série ont été plus compliqués que prévus à travailler.

« J’avais déjà travaillé avec Danny Boyle auparavant, c’est grosso modo la raison pour laquelle je me suis retrouvé dans le projet « Pistol ». Quand on travaille avec lui, on retrouve un esprit de famille. Il implique tout le monde dans le travail, de manière à ce que chacun puisse se sentir concerné. On ne fait pas seulement les costumes, on fait partie d’un tout. Danny Boyle n’a pas non plus le sens de la hiérarchie : il est très inclusif dans sa manière de fonctionner et c’est génial ! »

« Lorsque j’ai accepté ce job, j’ai d’abord pensé qu'il serait plus facile de travailler sur des personnages qui ont réellement existés. On peut en effet facilement trouver des photos du groupe. Je pensais donc qu'il suffirait de reproduire les looks. Ça semblait facile dans le sens où tout le travail sur le style avait déjà été fait.

Mais Danny voulait inclure de vraies images du groupe dans la série. Il en a utilisé beaucoup. Il fallait donc que les personnages de la série soient habillés de la même manière. J’avais peu de marge de manœuvre pour faire différemment.

Reproduire quelque chose de déjà existant, c’est vraiment beaucoup plus difficile que d’inventer au fur et à mesure. C’est créatif, mais d’une manière différente. On étudie la manière dont les vêtements ont été faits, on essaie de reproduire les motifs, on s’assure qu’on travaille le même tissu. C’est très intéressant au final mais ce n’est pas du tout ce à quoi j’étais habituée. »

« Les costumes sur « Pistol » ont donc été en grande partie réalisés sur mesure. On a reproduit des pièces Vivienne Westwood par exemple. Il n’en reste pas beaucoup de cette époque. Certaines ont été brûlées, d’autres n’étaient tout simplement pas faites pour durer. C’était des vêtements conçus pour le moment présent.

Nous avons travaillé avec Murray Blewett, qui travaille pour Vivienne Westwood depuis des années et connaît bien sa manière de penser. Il nous a vraiment beaucoup aidés. Il nous a également prêté des pièces. Joe Corré, le fils de Vivienne Westwood et de Malcom McLaren, possédait également des choses que nous avons pu copier.

Et puis j’avais une acheteuse fantastique, Julia, qui a trouvé toutes sortes de trucs vintage incroyables - elle est vraiment très douée. Parfois je lui demandais de trouver une pièce bien précise et elle revenait le lendemain en me disant « quelque chose comme ça ? » Et c’était exactement ce que je cherchais ! »

« Le plus important dans mon métier, c’est le personnage, tout ce qui va aider à le faire vivre : le style, les vêtements, la coupe, etc. C'est un tout. Mais dans la pratique, je ne suis pas certaine qu’on puisse par exemple réellement s’offrir le luxe de préférer des matières à d’autres quand on fait des costumes de films.

On peut être amené à travailler sur n’importe quel vêtement et n’importe quelle période. Il faut donc constamment s’adapter pour que votre travail fonctionne en fonction du budget alloué. Dans la mode, le sujet est davantage une question de style individuel. Dans les costumes de films, on adopte une esthétique différente selon les projets ou presque. »

3. Vivienne Westwood, la mode et l'éthique dans les costumes de cinéma

Vivienne Westwood est une des personnalités les plus singulières de la mode. Elle a fêté ses 80 ans en 2021 et a contribué dès le début des années 70 à forger l'identité de ce qui allait devenir en 1976-1977 le punk anglais. On peut aisément reconnaître sa patte de style : elle aime le motif tartan, les formes asymétriques, les têtes de mort et autres symboles ou bien encore les grands cols de chemises. C'est par ailleurs une artiste engagée et Liza Bracey ne cache pas son admiration pour son travail.

« Les producteurs de « Pistol » ont été directement en contact avec Vivienne Westwood et la contribution de la marque à la série a été de mettre Murray à notre disposition. Ceci étant, Vivienne Westwood ne s’intéresse pas au passé.

Elle est passée à autre chose depuis. La seule chose à laquelle elle pense, c’est ce qui va venir demain. Je ne crois pas qu’on puisse arriver à ce niveau d'excellence en se regardant uniquement le nombril. Dans l'industrie de la mode, Vivienne Westwood est par ailleurs à la pointe de l'éthique et de la durabilité et c’est super qu’elle poursuive dans cette voie »

« Nous devons tous nous préoccuper d’éthique et de durabilité vis-à-vis du vêtement. Or il y a c'est vrai beaucoup de gâchis dans le cinéma et ça peut même être assez terrifiant. C’est très facile par exemple d’aller faire son shopping chez des enseignes comme Primark et d’acheter des vêtements pas chers. C’est quelque chose que j’ai pu faire plus tôt dans ma carrière car je n’avais pas le budget nécessaire pour faire autrement.

Maintenant j’ai la chance d’avoir un peu plus de budget et j’essaie évidemment de prendre en compte les questions écologiques. Si jamais l’on doit utiliser du plastique, on essaie de le réutiliser autant que possible plutôt que de le jeter, etc. C'est de cette manière, en prenant soin de l'environnement, que nous devons vivre à présent. »

« Dans les années 70 et à l’époque où se déroule la série, on utilisait encore beaucoup de PVC. Ceci étant, on trouve encore du polyester de nos jours dans les tee-shirts et ce n’est vraiment pas une bonne chose car ces pièces ne se décomposeront jamais et laisseront s’échapper des microparticules, etc. Vu de l’extérieur, les matières plastiques utilisées à l’époque de la série ne semblent donc pas géniales mais sur les pièces que l’on peut trouver aujourd’hui en fast fashion, c’est tout aussi envahissant et on le remarque presque moins. En ce sens, je ne suis pas certaine que ce soit beaucoup mieux maintenant qu’à l’époque. »

4. Les clichés du punk, les personnages et la force du vêtement

Quand on pense aux Sex Pistols, on imagine le plus souvent un groupe volontiers destroy, avec un style vestimentaire qui pioche autant dans les friperies et la récup que dans l'avant-garde de la mode. Parmi les accessoires les plus clichés du mouvement punk : les badges et les épingles à nourrice qui fleurissent un peu partout, et notamment sur les blousons en cuir comme le Perfecto.

Si c'est une pièce que vous pourrez retrouver ici dans notre collection de vêtements, les plus punks d'entre vous oseront-ils la customiser avec des badges et des épingles ? L'héritage de ce courant de la fin des années 70, c'est justement une invitation à vous réapproprier votre style, et parfois à retravailler à votre manière vos vêtements. Liza Bracey insiste de son côté sur l'utilité du vêtement dans l'immersion des acteurs vis-à-vis de leurs personnages.

« Je ne voulais absolument pas tomber dans la caricature du style punk. Il y a dans la série des choses qui sont vraies mais qui paraissent clichées. Par exemple, lorsque le personnage de Johnny Rotten porte un débardeur en laine, avec une épingle à nourrice. J’ai pu voir des photos où il était habillé comme ça, c’est la raison pour laquelle nous avons reproduit fidèlement ce look.

Parfois on a donc l’impression que c’est cliché, notamment dès qu’il y a une épingle à nourrice mais je ne voulais pas de mon côté créer des punks en plastique. Les références factuelles sont très importantes, car la perception des gens change et devient elle-même un cliché avec le temps. Il faut donc s’en tenir autant que possible aux références historiques. C’est ainsi qu’on s’approche le plus de la vérité. »

« Parmi les pièces que je préfère chez les Sex Pistols, il y a les pantalons roses de Sid Vicious. Et aussi son gilet en léopard. Le vrai Sid portait réellement ce genre de pièces. J’aime aussi la patte artistique des vêtements de Johnny Rotten, qu’il fabriquait pour certains lui-même avant qu'il ne se mette à porter de plus en plus ceux de Vivienne Westwood. John Lydon a toujours conservé cette fibre personnelle vis-à-vis du style et du vêtement et ses tenues sont vraiment très intéressantes. »

« Anson Boon, qui l'incarne à l’écran, s’intéressait vraiment aux vêtements de son personnage. C’était un peu comme si nous travaillions ensemble sur ses costumes. Un certain nombre d’acteurs et actrices se sont impliqués dans les costumes de la série. En tant que costumière, je pense qu’il faut permettre à chacun de sentir son personnage.

J’aime donc que les acteurs soient impliqués dans le processus car je n’ai pas envie qu’ils se sentent obligés de porter des tenues par défaut. Parfois ils souhaitent être impliqués, d’autres fois non. Certains ne vont penser qu’à leur jeu et à leur performance et ils peuvent très bien le faire sans penser aux vêtements. Mais je crois de mon côté que les vêtements aident vraiment à entrer dans son personnage. »

5. Le gilet léopard de Sid Vicious : un vêtement iconique

Sid Vicious intègre les Sex Pistols en 1977. Il remplace Glen Matlock à la basse alors même qu'il ne connaît rien à cet instrument. Peu importe : son style complètement destroy va contribuer à forger la légende du groupe. Il affectionne entre autres les pantalons roses, les blousons en cuir et le motif léopard.

Son passage dans l'histoire sera néanmoins aussi bref que tragique. Il s'enfonce dans la drogue à la suite de sa rencontre avec l'américaine Nancy Spungen. Ensemble, ils formeront l'un des couples maudits les plus tristement célèbres de l'histoire du rock : elle meurt brutalement en octobre 1978, il la rejoint quelques mois plus tard dans l'au-delà suite à une overdose fatale. Il n'a alors que 21 ans. Le gilet en léopard de Sid Vicious est une des pièces les plus remarquables de la série « Pistol ».

« Obtenir certains imprimés sur les tee-shirts a certainement été une des choses les plus difficiles à réaliser sur cette série. C’est assez compliqué dans le sens où il faut obtenir les bonnes couleurs, la bonne échelle, etc. On avait bien sûr des modèles à suivre, mais les reproduire a été beaucoup plus compliqué que je ne l’imaginais.

Le gilet de Sid par exemple. Il a littéralement fallu partir de zéro. Nous avons du trouver le tissu, qui était un tissu utilisé pour fabriquer des ours en peluche d’origine allemande. Il a ensuite fallu l’imprimer. On s’est efforcé de reproduire le même design que la pièce originale. C’était assez compliqué de retrouver les mêmes couleurs. Dans l’équipe, on avait cependant un très grand artiste qui s’appelle Michael : au final, il a peint le vêtement à la main, par dessus le motif. Nous avions besoin de quatre copies identiques de ce vêtement. »

6. La révélation Sydney Chandler : le vêtement comme seconde peau

Parmi les révélations du casting, on peut citer la jeune actrice américaine Sydney Chandler, qui incarne ici la future chanteuse des Pretenders Chrissie Hynde. Steve Jones l'a répété plusieurs fois dans les médias : « Souvenez-vous, ce n'est pas un documentaire ». La série n'est donc pas exempte de passages fictionnels, à l'image de la relation entre Chrissie Hynde et Steve Jones montrée à l'écran. En revanche, le personnage de Sydney Chandler habite à la perfection les vêtements conçus par Liza Bracey.

« Sydney Chandler était vraiment super à habiller. J’ai d'ailleurs une histoire intéressante à son sujet, et encore une fois, je la dois à mon acheteuse Julia, que j’ai évoquée un peu plus haut. Lors de mes recherches, j’ai trouvé une très belle photo de Chrissie Hynde des Pretenders plus jeune - c'est le personnage que Sydney incarne à l'écran. C’est une photo en noir et blanc, avec un très beau look : elle y portait un Mac à rayures. J’ai alors dit à Julia : « Ce serait top si on pouvait trouver quelque chose comme ça mais je ne suis pas sûr que ce soit possible car c’est une pièce assez singulière. »

« Elle est revenue vers moi une semaine plus tard, m'annonçant qu'elle avait trouvé la pièce. C’était exactement la même que sur la photo ! Nous nous sommes évidemment efforcées de la mettre autant que possible en valeur dans la série. Habiller Sydney Chandler, c’est pour ainsi dire le rêve : tout lui va à merveille et elle aime les vêtements par ailleurs. Elle se les approprie tout de suite. En fait, les vêtements font bien plus que lui aller : ils sont comme une seconde peau pour elle. »

7. Le personnage de Jordan Mooney et le retour du conservatisme vestimentaire

Pamela Rooke, plus connue sous le nom de Jordan Mooney, était une des figures du mouvement punk : mannequin et collaboratrice de Vivienne Westwood, elle appartenait elle aussi au cercle des Sex Pistols. Dans la série, elle est incarnée par Maisie Williams (« Game Of Thrones ») et son personnage est assurément l'un des plus stylisés de l'équipe. On trouve également quelques personnages clés de la scène musicale en arrière plan, comme Billy Idol ou Siouxsie - sans ses Banshees. Quel souvenir Liza Bracey garde-t-elle de Jordan ?

« Je me souviens d'une scène particulièrement émouvante à propos de Jordan Mooney pendant le tournage - elle est décédée depuis. On était alors en plein Covid, il fallait manger chacun à sa table et à l’extérieur. Il ne faisait pas très beau et Jordan était venue sur le tournage.

Elle nous a beaucoup aidés, nous a raconté beaucoup d’histoires et d’anecdotes sur la boutique Sex dans laquelle elle travaillait. Je la revois encore ce jour-là, me dire à quel point elle trouvait cela bizarre de voir quelqu’un ressembler à ce qu’elle était plus jeune, habillé exactement de la même manière, avec le même maquillage. Je ne pouvais pas vraiment me l'imaginer moi-même, mais ça doit effectivement être une sensation étrange à vivre ! »

« Dans la série, son personnage choque les passants lorsqu'elle traverse la ville avec un haut transparent, qui laisse entièrement apparaître sa poitrine. Je pense qu’une femme seins nus dans l’espace public est une image encore assez choquante pour les gens de nos jours. Étrangement, je pense même qu’on peut bien plus facilement choquer les gens à travers une tenue aujourd’hui qu’à l’époque des Sex Pistols. »

« Nous avons par exemple eu quelques problèmes avec les messages inscrits sur les tee-shirts faits par Vivienne Westwood. Ils étaient faits pour être choquants à l’époque : c’était l’objectif. Aujourd’hui, il faut véritablement être prudent avec ça, les gens sont plus facilement outrés. Ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose car il y a certaines images qu’on n’a pas envie de voir. Mais le revers de la médaille, notamment sur les réseaux sociaux, c'est que les gens ont tendance à manquer d'audace et à faire un peu tous la même chose : ils veulent ressembler aux Kardashian, etc. »

8. Inspirations et influences

Quand on la questionne sur ses influences, ses costumiers ou créateurs préférés, Liza Bracey évoque notamment le travail de la costumière Natalie Ward, avec qui elle a pu travailler sur plusieurs films. Et figurez-vous que sa passion est communicatrice : j'ai en effet revu le film qu'elle évoque plus bas précisément pour observer attentivement le travail sur l'indigo dont elle parle. Le sens du détail n'est cependant pas la seule chose qu'elle apprécie chez les autres et dans son métier.

« J’aime beaucoup le travail de la costumière Alexandra Byrne. Je suis toujours époustouflée lorsque je regarde un film sur lequel elle a travaillé. J’aime aussi ce que fait Jane Petrie, une amie à moi. Il m’est déjà arrivé d’adorer les costumes d’un film et de découvrir avec surprise son nom à la fin du générique. J’aime également le travail de Natalie Ward, une autre amie que j’ai pu assister dans son travail. Chaque fois que je suis un projet et que je me sens un peu coincée, je me demande ce que Natalie pourrait faire. Ce sont trois costumières très inspirantes.  »

« Je vous invite par exemple à jeter un œil sur le travail d’Alexandra Byrne dans « Mary Stuart, Reine d’Ecosse ». Les costumes sont sublimes. C’est un film de 2018 qui se déroule à la fin du 16ème siècle. Alexandra a utilisé beaucoup de denim pour les costumes, ce qui est très inhabituel mais cela fonctionne particulièrement bien.

Il y a notamment une scène où le personnage principal se trouve à cheval sous la pluie pendant une bataille. Dans la séquence suivante, on la voit enlever sa robe et on peut apercevoir le colorant bleu qui a traversé les vêtements qu’elle porte en dessous. C’est magnifique, très beau, très intelligent. Et puis bien sûr, parmi les personnes que j’admire, il y a Edith Head, si l’on remonte dans le temps. J’adore les vêtements qu’elle a pu faire depuis que je suis enfant.  »

« En ce qui concerne la mode, j’aime évidemment Vivienne Westwood. Elle était nouvelle et inconnue dans ce milieu. Elle n’a pas suivi de formation. Elle est simplement allée de l’avant. Son compagnon Malcom achetait des tas de chemises rayées sur lesquelles elle peignait. Il pouvait acheter toutes sortes de dead stock et elle trouvait toujours le moyen d’en faire quelque chose de tout à fait différent... Et le vendre !

J’aime aussi Margiela, même encore maintenant, Marni ou bien encore Dries Van Noten. J’aime les couleurs et les idées simples, d’une manière générale. En fait, ce qui est intéressant avec la mode, c’est que cela fonctionne de manière cyclique. À chaque nouveau cycle, on ajoute quelque chose : on peaufine, on actualise ou on personnalise. C’est bon pour la créativité.

Lorsque j’étais plus jeune, j’avais mes périodes préférées en termes de mode. Mais j’ai découvert tellement de choses avec le temps, sur des périodes très différentes les unes des autres que ma période préférée est tout simplement devenue la prochaine sur laquelle je serai amenée à travailler. »

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