Pourquoi je préfère regarder le vêtement au cinéma plutôt que chez Netflix, Disney+ et cie - Bobine

6 min

Pourquoi je préfère regarder le vêtement au cinéma plutôt que chez Netflix, Disney+ et cie - Bobine

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Publié le : 24 juillet 2022Mis à jour le : 24 juillet 2022
salle cinema terminator 2 james cameron Schwarzenegger ecran noir bleu

Tandis que notre vestiaire estival se dévoile, les programmes TV se relâchent. Je profite de cette accalmie pour vous livrer mes petites réflexions de l'année autour du style, de la mode et du cinéma. Depuis l'avènement de la vidéo et plus récemment des plateformes comme Netflix, on peut regarder des films partout, et notamment chez soi. Mais quand il s'agit d'apprécier les subtilités du vêtement à l'écran, j'ai mes petites préférences. Je vous raconte.

1. LE SOUVENIR DU BLOUSON EN CUIR DE « TERMINATOR 2 »

J'ai un souvenir assez précis du premier film que j'ai vu au cinéma. C'était en 1991, j'avais 13 ans et j'y étais allé avec un copain de classe. À cet âge, je vivais dans une petite ville de Mayenne somme toute banale. Pas de cinéma, pas beaucoup d'activités d'une manière générale. Il était encore possible de savoir si quelqu'un habitait en ville ou à la campagne. Le style, en apparence, était bien souvent du côté des urbains. C'est du moins ce que je pensais alors, du haut de mes 13 ans.

La grande ville la plus proche pour moi, c'était Laval, soit une bonne vingtaine de kilomètres. Laval n'est pas une très grande ville, mais à l'échelle d'un gamin qui ne connaissait pas la ville, c'était l'équivalent de la capitale. On pouvait s'y rendre en car. Sinon, il fallait trouver un parent suffisamment motivé et disponible pour vous y emmener. C'est-à-dire que ce n'était pas si simple pour moi d'aller au cinéma.

Le premier film, ce n'était ni un Orson Welles ni un Jean-Luc Godard. C'était un film de James Cameron qui vieillit d'ailleurs plutôt très bien : « Terminator 2 ». C'est la première fois que j'ai entendu parler de Public Enemy. Et c'est aussi, peut-être, la première fois que j'ai vu un blouson de type Perfecto d'aussi près.

Ce look de biker, je m'en souviens comme si c'était hier. Pourtant, je ne m'intéressais pas autant aux vêtements qu'aujourd'hui - mon premier réflexe actuel, ce serait bien sûr d'essayer de retracer le parcours de cette pièce de légende, et pour ça, on peut par exemple regarder ici.

Des années plus tard, je me suis procuré un Perfecto d'occasion, pour essayer. Je m'en suis séparé depuis à contrecœur, mais ce type de blouson est toujours resté dans un coin de ma tête, ne serait-ce que parce que certains de mes musiciens préférés le portaient aussi :

J'y reviendrai peut-être plus tard. En attendant, mon premier vêtement marquant au cinéma, c'est un blouson de type Perfecto et si je l'avais vu à la télévision ou via une cassette vidéo, cela ne m'aurait probablement pas fait le même effet.

Le propre du grand écran, c'est son côté immersif et spectaculaire. C'est encore plus vrai quand on est très jeune et qu'il s'agit de cinéma d'action : on en prend littéralement plein les yeux et les oreilles. Ça m'a donc fortement marqué. Cette magie-là ne m'a jamais vraiment quitté : pour apprécier la justesse ou le charme d'une tenue dans un film, il n'y a pas mieux que le grand écran.

2. LA RECHERCHE ET LES MATIÈRES

La deuxième raison qui me fait préférer le vêtement au cinéma est en apparence moins émotionnelle et spectaculaire. Vous le savez, chez BonneGueule on s'intéresse de très près aux matières textiles. C'est d'ailleurs une des particularités premières de nos collections de vêtements et Benoit lui-même aime à définir les choses ainsi :  « Pour moi, BonneGueule c'est avant tout de la texture, des tissus, des matières. ».

Mais c'est aussi parfois des moments marquants de cinéma qui ressurgissent, comme en témoigne le lien entre les films de James Bond et notre costume brun Breno. Benoit raconte cette histoire dans cet article :

Parler de style, de mode et de vêtements au cinéma, c'est aussi s'intéresser aux matières et aux tissus qui habillent les personnages. Mais dans de très nombreux cas, cette recherche s'apparente au travail d'un détective. C'est parfois laborieux mais toujours passionnant.

Pour les films hollywoodiens les plus anciens et les plus célèbres, je regarde parfois du côté des wardrobe tests - ce sont des essayages pour les costumes de films et vous trouverez facilement quelques exemples sur des sites comme Pinterest. Au-delà du charme vintage de ces images, c'est parfois riche d'enseignements car on visualise facilement une tenue complète. Ça ressemble à ça :

D'une manière générale, pour obtenir quelques renseignements sur des tenues de cinéma, il faut fouiner sans relâche, consulter des archives, lire à droite à gauche, remonter et vérifier des pistes plus ou moins fiables, etc. J'opte aussi régulièrement pour la solution la plus simple et la plus compliquée à la fois : tenter de contacter les personnes qui ont œuvré aux costumes d'un film. Mais comme vous vous en doutez, cela ne donne pas toujours des résultats.

C'est donc parfois compliqué d'en savoir plus et notamment de connaître la composition d'un vêtement au cinéma. L'exemple le plus parlant, c'est peut-être le sujet que j'avais consacré au manteau en tweed. Pour l'expérience, j'avais sollicité l'œil expert de mes collègues David et Julien à partir d'une série de photographies. Ce petit jeu en interne s'appelait tweed or not tweed ? :

Le moins qu'on puisse dire, c'est que même pour un expert, définir précisément la matière d'un vêtement au cinéma s'apparente parfois à une énigme à résoudre. Si l'on regarde des films chez soi, avec un écran de taille moyenne, vous me direz qu'il y a toujours possibilité d'observer plus attentivement, en faisant un arrêt sur images par exemple. Sauf que ce n'est pas toujours probant.

Au cinéma en revanche, la taille de l'écran est gigantesque. C'est une expérience visuelle en soi. C'est aussi le plus sûr moyen selon moi d'apprécier tous les petits détails qu'on ne relève pas forcément depuis l'écran de son salon : une texture particulière, un tombé, des nuances de couleurs. Tout est magnifié au cinéma, et surtout en plus grand. Pour un amateur de vêtements curieux, c'est très loin d'être anecdotique.

3. LE GÉNÉRIQUE DE FIN ET SES INFORMATIONS UTILES

Mon troisième point suit la même logique que le précédent. C'est un classique du cinéma : la plupart des gens quittent la salle dès que le générique de fin arrive. Celles et ceux qui restent, ce sont entre autres les personnes comme moi, qui aime conclure une expérience de cinéma par une musique entêtante ou simplement recueillir des références ou des informations intéressantes sur l'équipe du film. Certains ont même des petites subtilités, comme chez Harry Potter par exemple :

On peut bien sûr lire ces informations depuis son salon quand on regarde un film. Mais selon la taille de votre écran, c'est parfois minuscule et/ou illisible. En outre, si vous regardez des films sur certaines grandes chaînes de télévision, vous avez sans doute remarqué qu'elles ont désormais pris la fâcheuse habitude de couper cette partie, pour gagner du temps.

D'où l'intérêt des salles de cinéma : les films sont diffusés dans leur intégralité. Les lumières se rallument progressivement à la fin. Je peux écouter, lire et même prendre des notes quand il y a des informations importantes - des noms de marques de vêtements cités par exemple. Ces informations-là sont précieuses et j'aime prendre le temps de les découvrir car on y fait des découvertes parfois fascinantes. Un exemple concret ? Le listing de marques de mode coréenne qu'on trouve dans le générique du film « Parasite » :

4. UN EXEMPLE RÉCENT : « CRIMES OF THE FUTURE » DE DAVID CRONENBERG

Évidemment, il y a plein de bonnes raisons de ne pas aller au cinéma : le prix, l'accessibilité, les gens qui parlent, mangent ou allument leur téléphone ou tout simplement la flemme. Mais il y a plein d'autres bonnes raisons d'y aller : l'expérience collective, l'image, le son, l'immersion, etc. Je suis moi aussi confronté à ces différents dilemmes et j'y vais très certainement moins que je ne le voudrais. Reste que l'expérience est unique, et que j'y apprécie à la fois mieux les images et les vêtements.

Le dernier film que je suis allé voir, c'est « Crimes of the Future » de David Cronenberg. Ce n'est pas nécessairement son meilleur, mais il fait partie de ces quelques auteurs que j'aime suivre par fidélité. Si le vêtement n'occupe pas une place centrale dans son œuvre, sa réflexion sur le corps m'a toujours intéressé.

Son dernier film, c'est un casting très alléchant sur le papier et des tenues très intéressantes à observer. Au hasard le style mi-Jedi mi-Ninja techwear de Viggo Mortensen, les tenues très stylisées de Kristen Stewart ou celles, plus simples et décontractées de Léa Seydoux - parmi ces dernières, certaines pourraient pourquoi pas trouver leur chemin dans un lookbook Officine Générale. Les costumes du film sont signés Mayou Trikerioti et le visionnage dans une salle de cinéma leur donne une force particulière.

Je reverrais peut-être ce film plus tard, à la télévision ou via une plateforme cinéma. Mais il est probable que les vêtements du film n'auront pas tout à fait la même saveur.

Et si je me risquais à faire un parallèle avec la mesure et le prêt-à-porter ? Dans une de nos interviews Déclic, Romain Biette d'Ardentes Clipei expliquait à propos de la mesure : « l'expérience, c'est ce qui fait la différence » :

Tout comme la mesure, l'expérience du film au cinéma fait elle aussi la différence. C'est une bulle à l'abri des multiples sollicitations extérieures - Internet et sa myriade de notifications, pour ne citer que celles-ci. De fait, je suis toujours pleinement concentré sur ce que je regarde lorsque je vais au cinéma.

Si vous souffrez parfois de troubles de l'attention, que tout vous paraît désormais trop long, que vous êtes régulièrement tentés d'appuyer sur pause ou de jeter un œil à votre téléphone portable, le cinéma est à mon sens l'un des meilleurs refuges au monde moderne. Mon astuce pour ne pas me laisser aspirer par le temps pressé ? Je garde ce tweet éloquent dans un coin de ma tête :

Il fonctionne globalement avec tout, et notamment avec les œuvres cinématographiques d'une durée de trois ou quatre heures. Ce phénomène, qui touche ici de manière ironique le capitaine Haddock, c'est précisément ce que je ne souhaite pas vivre avec les livres, les films et tout ce qu'il y a dedans. Après tout, aimer le vêtement pour moi, ça veut aussi dire prendre le temps de comprendre et d'observer.

Si je regarde aujourd’hui des films en salles ET à la maison, mes préférences iront finalement toujours pour le grand écran, et ce pour toutes les raisons évoquées plus haut. Si le cinéma en sort grandi, il y a de grandes chances que le vêtement y trouve lui aussi son compte.

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