Le motif psychédélique : les années 60-70, des Beatles à Pink Floyd (1/4)

7 min
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Le motif psychédélique : les années 60-70, des Beatles à Pink Floyd (1/4)

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Publié le : 8 août 2022Mis à jour le : 8 août 2022

Nos récentes sorties le confirment : on aime le motif Paisley chez BonneGueule. Des Beatles à Prince, sa popularité est assez intimement liée à la musique, notamment grâce aux courants psychédéliques des années 60. Mais le Paisley est-il vraiment l'unique motif du psychédélisme ? Et comment l'apprivoiser dans la vie quotidienne ? Petit tour d'horizon en musique... et en looks à motifs. Première partie : les années 60-70, des Beatles à Pink Floyd.

(Crédit photo de couverture : le groupe Pink Floyd à Londres, mars 1967 - Photo Cyrus Andrews/Michael Ochs Archives/Getty Images)

1. AUX ORIGINES DU PSYCHÉDÉLISME

Réenchanter le monde via les drogues. Dans les années 50, c'est l'idée sous-tendue par Humphrey Osmond. Il s'agit du psychiatre de l'écrivain Aldous Huxley, lui-même auteur des « Portes de la perception » en 1954.

Le premier glisse pour la première fois le terme « psychedelic » dans leur correspondance commune. Le second s'intéresse de près au sujet des psychotropes, sans pour autant le laisser apparaître d'un point de vue vestimentaire. Le costume trois pièces d'Aldous Huxley renfermerait-il quelques secrets psychédéliques ? Possible.

En attendant, d'autres suivent la piste des drogues dites psychédéliques. Par exemple le psychologue Timothy Leary, ou la C.I.A. C'est encore aujourd’hui l'aspect hautement hallucinogène qui prime dès lors qu'on parle de psychédélisme.

Mais ce n'est pas vraiment injustifié. On a bien imaginé des bandes-son jouées live, pour accompagner les expériences avec le LSD et consorts. On appelait ça des « Acid tests ». Le rock psychédélique, également appelé acid-rock, se développe vers 1965. Les morceaux s'étirent, l'improvisation et l'expérimentation se font sous influences.

On y découvre alors des réminiscences de blues, de folk, de jazz ou de raga indien. En 1966, le groupe texan 13th Floor Elevator est le premier à utiliser le mot « psychedelic » sur une pochette de disque. Les couleurs et le graphisme parlent d'eux-mêmes :

En revanche, ce qu'on désigne comme psychédélique devient bien vite autre chose qu'une simple expérience musicale hallucinogène. C'est un style à part entière. Presque un mode de vie. Il imprègne assez fortement la culture de la fin des années 60. Dès 1966, les Beatles révèlent ainsi une approche musicale psychédélique au monde entier dans l'album « Revolver ». La musique est la fois populaire et expérimentale.

Pour les Beatles, c'en est alors fini des costumes cintrés et des coupes au bol. Place aux inspirations vestimentaires venues de France, d'Inde ou du cerveau de l'écrivain Lewis Carroll. On expérimente alors avec la musique mais aussi avec les vêtements. Grâce à eux, le psychédélisme va réellement pouvoir sortir du bois.

Ils ne sont bien sûr ni les seuls ni les premiers à baigner dedans. Regardez de l'autre côté de l'Atlantique, chez Jefferson Airplane ci-dessous. Le style vestimentaire laisse apparaître de nombreux motifs :

Entre Londres et la Californie, plusieurs visions du genre psychédélique se développent donc, de 13th Floor Elevator à Pink Floyd, de Jefferson Airplane à Jimi Hendrix. Tout ceci coïncide avec les mouvements libertaires d'une partie de la société et de la jeunesse. La musique se libère, la mode se réinvente et se réapproprie des motifs plus ou moins oubliés.

Chez les femmes, le motif psychédélique prend comme chez les hommes diverses formes : robes, hauts, vestes, accessoires. L'une des figures du psychédélisme californien des années 60 n'est autre que Grace Slick. Vous pouvez l'entendre dans le célèbre « White Rabbit » de Jefferson Airplane. Et la voir ci-dessous, arborant du motif Paisley là où ses camarades affichent un look pas si éloigné des collègues de The Byrds :

Le psychédélisme touche dans la foulée de nombreux domaines. La musique donc, mais aussi les arts visuels, le cinéma, le design et bien sûr la mode, entre autres à travers certaines créations d'Yves Saint Laurent dans les années 60-70. Il porte d'ailleurs lui-même des motifs parfois étonnants :

2. AU CŒUR DES MOTIFS

Parmi les motifs les plus communément associés au psychédélisme, on trouve le Paisley. Il est d'origine iranienne, plutôt synonyme de luxe et d'extrême élégance jusqu'à ce qu'il soit repris et/ou détourné par nombre des artistes évoqués dans cette série. Chez BonneGueule, il apparaît sur des pièces aussi variées que des pantalons, des chemisettes, des robes et des accessoires. Et c'est parfois même... un motif caché.

On peut cependant étendre le motif psychédélique à bien d'autres choses que le Paisley : le floral, le liberty, les motifs du Moyen-Orient d'une manière générale mais aussi les formes sinusoïdales ou géométriques, le tye and die. Le point d'ancrage, c'est bien souvent l'omniprésence parfois kaléidoscopique de la couleur.

L'idée générale, c'est que le motif soit propice à la rêverie plus ou moins licite, avec un petit quelque chose d'acidulé voire de tout à fait acide dans la couleur ou l'intention. Le vêtement devient ainsi synonyme de sensation. En clair : si le vêtement ne vous fait pas un minimum planer de l'œil, c'est qu'il n'est peut-être pas psychédélique.

POUR ALLER PLUS LOIN

Le psychédélisme est un sujet tentaculaire. En musique par exemple, le genre est protéiforme et fourmille de disques et de formations plus ou moins oubliées. Si jamais cette musique vous intrigue, vous pouvez vous plonger dans cet ouvrage de David Rassent aux éditions Le Mot et le Reste :

Quant aux motifs liés à ce style, ils donnent surtout envie de se plonger dans les livres d'Histoire, à la découverte de l'artisanat textile du Moyen-Orient. Notez qu'en musique, on peut porter des choses psychédéliques sans en emprunter le style musical. Et inversement. C'est le cas par exemple du Velvet Underground ou de Lou Reed, ici en solo en 1972 :

3. « TOMORROW NEVER KNOWS » : LES BEATLES, LA POP MUSIC ET L'INSPIRATION INDIENNE

« Revolver » n'est pas l'album le plus psychédélique des Beatles. Pour ça, il faut plutôt regarder du côté de « Sgt. Pepper » ou de « Magical Mystery Tour » - les pochettes, déjà. En revanche, ce disque est annonciateur des bouleversements musicaux et stylistiques à l'œuvre chez les Beatles. La période la plus psychédélique du groupe se traduit entre autres par une explosion de couleurs. C'est particulièrement visible sur ce petit schéma, qui retrace leur évolution stylistique en seulement dix ans d'existence :

En 1967, le groupe suit une initiation à la méditation transcendantale. Quelques mois plus tard, il s'envole pour l'Inde à la rencontre du Maharishi Mahesh Yogi. Toutes ces expériences influeront d'une manière ou d'une autre la musique et les tenues du groupe.

Dans ces années-là, le psychédélisme explose de part et d'autre de l'Atlantique. À San Francisco, il est incarné par des groupes comme Jefferson Airplane ou le Grateful Dead. À Los Angeles, on peut regarder, dans une moindre mesure psychédélique, du côté de Love ou The Doors. Quant à Londres, c'est l'ébullition chez Pink Floyd ou les Beatles. Même les Rolling Stones se font psychédéliques, notamment via l'album « Their Satanic Majesties Request ». Mick Jagger et Brian Jones se sont d'ailleurs bien essayés aux motifs psyché, avec succès, comme ici en 1966 :

Le psychédélisme n'est pas davantage étranger aux Beatles. Le guitariste George Harrison en particulier est très très friand de motifs psychédéliques. Certains vous diront que c'était l'un des plus stylés du groupe. Regardez plutôt la photographie ci-dessous. La cravate est résolument psychédélique. Avouez aussi qu'elle ajoute quelque chose qui n'existerait pas sans elle :une grosse dose de fantaisie, mariée à une chemise violette et une veste en denim, col légèrement relevé. C'est assez magnifique :

Mais ses camarades ne sont pas en reste. On a déjà pu décrypter un look de Paul McCartney via un épisode de Gimmick. Si ses tenues des années 60 ne sont pas toutes en mesure de trouver une correspondance dans le monde contemporain?Les coupes en particulier sont parfois très connotées, il y a tout de même ici et là des choses qui résonnent encore aujourd'hui. Regardez par exemple ce cliché de 1966 :

paul mccartney beatles chemise paisley marron

© Mark and Colleen Hayward/Redferns

Paul McCartney à Londres, vers 1966.

C'est une chemise Paisley marron, avec quelques inspirations militaires. En bas, on distingue seulement un pantalon violet. Il se conclut très certainement par une paire de souliers - des mocassins noirs, pourquoi pas. Vous trouverez bien d'autres tenues intrigantes chez les Beatles dans les années 66-67. C'est une période charnière pour le groupe, qui s'émancipe de tous les carcans, en particulier vestimentaires.

Des tuniques, des motifs, des chemises à jabots et de la couleur vive. Le style imprimé par les Fab Four mixe différents univers culturels et témoigne de l'effervescence vestimentaire qui secoue l'Angleterre, Londres en particulier. Notez que le psychédélisme a ses couleurs favorites : le fuchsia, le jaune, les teintes de vert et d'orange, etc. Un exemple ci-dessous chez John Lennon :

LES ASTUCES À RETENIR

  • Osez la couleur et la fantaisie. Plus qu'aucun autre, le motif psychédélique invite à s'amuser avec le style. Chez les Beatles par exemple, on ne choisit pas : c'est tantôt sobre et élégant, tantôt fantasque et ultra-coloré selon l'humeur, le contexte.
  • Une cravate psychédélique bien choisie peut faire des merveilles avec une veste en denim, comme chez George Harrison.
  • Pantalon blanc et chemise à motif psychédélique forment une association intéressante, comme chez Mick Jagger. Elle fonctionnera également avec une chemisette.

Pour d'autres motifs chez les Beatles :

4. « SEE EMILY PLAY » : PINK FLOYD, SYD BARRETT ET L'EXPLOSION DU PSYCHÉDÉLIQUE

Un des disques les plus vendus des années 70 n'est autre que le « Dark Side Of The Moon » de Pink Floyd. Mais avant de devenir l'un les fleurons du rock planant et progressif, Pink Floyd est une des étoiles de la scène underground psychédélique londonienne. En 1966-1967, le groupe est animé par Syd Barrett, l'un des plus grands génies maudits du style rock?Pour en savoir plus, je vous invite à lire ce qu'en raconte le journaliste Nick Kent dans « L'envers du Rock »..

Cramé par l'usage des drogues, il sera progressivement poussé vers la sortie de Pink Floyd en 1968. Il implose littéralement alors même que le psychédélisme explose de par le monde. Nombreux sont ceux qui ne sortiront pas indemnes des années 60. En attendant,« Piper at the gates of dawn », le premier album du groupe, est un classique du genre.

Du reste, le style vestimentaire imprimé par Pink Floyd est à l'image du swinging London : coloré, peuplé de motifs, de chemises à jabots et de foulards. Difficile à porter au quotidien, pensez-vous ? Évidemment, les tenues du Pink Floyd de ces années-là sont relativement marquées. Mais c'est aussi ce qui en fait le charme.

Le groupe ne s'habille d'ailleurs pas qu'avec des couleurs fortes, des matières improbables et du motif. On peut piocher ici et là quelques inspirations, pour une approche plus contemporaine. Le gilet à motifs, par exemple, souvent utilisé. Les chemises et les foulards évidemment, dans une version plus actuelle. Des associations de couleurs. Et tout ce qui n'est pas forcément psychédélique mais qui contribue tout autant au style de Syd Barrett. Vous pourrez en voir un aperçu sur certains clichés qui circulent sur la toile : le caban, le blazer en velours, le henley ou les hauts rayés.

LES ASTUCES À RETENIR

  • On peut retrouver un peu du charme et des curiosités vestimentaires du psychédélisme sixties en regardant du côté des pièces vintage.
  • Calmez les motifs trop forts si besoin, jetez un œil sur la toile, à la recherche des looks de Syd Barrett - tous ne sont pas 100% psychédéliques et il y a des pièces très utiles en ce sens et que vous possédez peut-être même déjà.

Pour explorer d'autres motifs, à fleurs par exemple :

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