Reportage : Pitti Uomo 88 (été 2015), l’élégance italienne en été #1

9 min

Reportage : Pitti Uomo 88 (été 2015), l’élégance italienne en été #1

9 min
Publié le : 2 juillet 2015Mis à jour le : 10 janvier 2020
Nicolò est retourné au Pitti Uomo pour l'édition de janvier 2020. Comme en janvier 2019, il vous livre ici ses impressions, ses bonnes et ses mauvaises surprises.

Le Pitti Uomo, c'est quoi ?

Deux fois par an, pendant 4 jours, Florence devient la capitale de la mode et du style grâce au Pitti Uomo, l’un des plus grands et des plus célèbres événements dédiés à la mode masculine.

Si ce salon professionnel international était initialement connu pour les acheteurs du monde entier qui venaient faire leurs emplettes, cette manifestation a progressivement évolué en un rendez-vous incontournable pour les hommes du monde entier.

Outre le fait de faire la promotion du Made in Italy dans le monde, le Pitti est aussi un espace d’expression où se côtoient tous les styles dans tous leurs excès.

Pour d’autres, c’est l’occasion de rendre visite aux fournisseurs, de nouer de nouvelles relations, de capter des tendances, ou encore de rencontrer les jeunes créateurs.

Pitti Uomo 88

Pendant l’événement, des passionnés de mode envahissent la ville pour découvrir en avant-première les collections qui seront en boutique l’année prochaine. Le Pitti Uomo n’est pas seulement une exposition d’objets et de tendances, c’est aussi un énorme événement avec beaucoup de rendez-vous incontournables au sujet de la mode, de la culture et de la fête.

Pour les maisons de créateurs, le Pitti représente une occasion en or pour faire leur promotion, sans débourser des sommes colossales pour figurer au défilé d’une Fashion Week !

Le Pitti Uomo et Florence sont liés par une histoire qui a plus de soixante ans, marquée par une forte tradition de l’artisanat et du Made in Italy.

Le Pitti Uomo édition 88

C'est devenu une tradition chez BonneGueule : deux fois par an, c'est avec impatience que nous nous rendons à Florence pour le Pitti Uomo. Et comme d'habitude, on revient avec plein d'envies en tête, y compris de porter une veste quand il fait plus de 30°C (un véritable bizutage sartorial).

Cette fois-ci, notre dossier comporte deux parties :

  • la première, celle que vous vous apprêtez à lire, où je parle de ce qui m'a le plus interpellé au Pitti,
  • et la deuxième, à paraître demain, le tant attendu reportage vidéo sur le salon ! Et j'ai une bonne nouvelle : nous sommes désormais sur un format plus long, plus fouillé, de plus de 10 minutes. Toujours plus de vestes aux épaules coupées au scalpel, de pantalons courts, de double monks ouvertes, et de cravates vertigineuses...

Mais avant, place au témoignage de Luca. C'était son baptême du feu, son tout premier Pitti, qui est un évènement marquant dans la vie d'un homme qui aime un tant soit peu porter le blazer. Voici son ressenti :

Note de Luca : Grand amateur (vous le savez) du style italien, j’ai été comme une souris lâchée pour la première fois dans un bain de gruyère, ou comme Benoît à son premier concert de David Guetta. Bref, j’ai été tout d’abord émerveillé par ces couleurs, par ces hommes tirés à quatre épingles et surpris du réel rendu (celui dans la vraie vie, pas en photo) : quand vous êtes sur cette Piazza Fortezza Da Basso. Rien ne change par rapport à ce que vous voyez sur le web ou dans les magazines.

Pitti 88 beckett & Robb

Luca aux côtés de Samir (à gauche), et les fondateurs de Beckett & Robb à droite. Peu de chaussettes, des pantalons blancs courts, on ne s'est pas trompé de salon.

J’ai aussi été très surpris du nombre de « poseurs » au Pitti. Ces grandes figures mondialement connues posent toute la journée sur la place. Intrigué, j’ai voulu en savoir plus en demandant aux stars ce qu’ils faisaient ici. Vous trouverez surement ça bizarre, mais ces hommes apportent une énergie et une ambiance sans lesquelles le Pitti ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui. Ces gens sont avant tout des passionnés et une source d’inspiration pour beaucoup (allez, pour moi aussi je l’avoue).

Merci Luca pour ce témoignage.

Pour aller dans son sens, il est toujours aussi amusant de constater que certaines « superstars » du Pitti ne font pas grand-chose à part discuter sur la place centrale. Elles doivent évidemment avoir quelques rendez-vous à l'intérieur, mais la majeure partie de leur temps est passé dehors, bien au milieu du salon.

C’est le genre de comportement qui pourrait facilement agacer n’importe quel Français ("Mon Dieu ! Un homme qui cherche délibérément à se faire prendre en photo ! Quelle arrogance !" ), mais personnellement, je trouve que ça participe beaucoup à la bonne ambiance du Pitti.

Personne n’est dupe, mais tout est fait dans un esprit bon enfant et plutôt joyeux. Les gens sont très contents d’être là, et ça se sent. Luca, qui a dû mener de nombreuses interviews dehors, peut témoigner : les gens sont bien plus accessibles et détendus que dans n’importe quel autre salon.

Ils prennent beaucoup de plaisir à parler spontanément de leurs vêtements.

pitti uomo 88

Ne vous y trompez pas, les lunettes à l'effet miroir bleuté étaient beaucoup moins présentes qu'à l'hiver dernier.

Cette fois-ci, je voulais savoir s'il y a vraiment des différences en termes de tendances, entre l’été 2014 et l’été 2015. Et bien ma réponse va vous décevoir, mais pas tant que ça. On pourrait me mélanger les photos des deux Pitti, je serai bien incapable de reconnaître quelle tenue vient de quel Pitti.

D'ailleurs, j'ai même plutôt constaté que les tenues semblent s'être assagies : moins d'accessoires flamboyants, moins de couleurs vives, mais des couleurs plus basiques et quelques détails discrets.

En effet, il y avait beaucoup de blazers bleus ou beiges unis, sans beaucoup plus d'artifices. Beaucoup des tenues que j'ai vues auraient pu être à Paris sans trop de difficultés.

Nick Wooster Pitti 88

Même Nick Wooster s'est affiché avec des tenues plus sobres qu'à son habitude.

Seules les superstars habituelles du Pitti semblent continuer à explorer de nouveaux motifs ; comme l'immense Mr. Raro et sa démarche très reconnaissable ou le célèbre Giorgio Giangiulio...

Cela dit, voyons les tendances (ou plutôt les éléments récurrents qui m'ont interpellé cette année), malgré une sobriété bien présente à cette édition.

1. Les chapeaux : vive le Panama !

Samir Bureza

Samir, fondateur de la marque Bureza, est une figure incontournable du Pitti, avec un Panama parfaitement porté. Il a toujours beaucoup de goût dans ses tenues, en plus d'être d'une grande sympathie. Une très bonne source d'inspiration ! Avec le pantalon blanc et la veste croisée, il a activé son "mode Pitti".

Ça n'a échappé à personne, c'était l'accessoire star du Pitti. Il y en avait tellement... C'est un accessoire estival très efficace, mais sur lequel il est assez facile de se louper... Sans compter l'offre en panama qui est souvent assez cheap ! Bref, le chemin vers un Panama bien porté est pavé d'embûches en tout genre. Mais si vous vous fiez à votre bon goût, le résultat sera très, très élégant.

Faisabilité en France : récemment, vous avez croisé combien d'hommes bien habillés avec un Panama bien porté ? Pas beaucoup j'imagine. C'est une tendance qui risque bien de ne jamais franchir les Alpes. Si vous voulez vous y frotter, arrangez-vous pour avoir le reste de la tenue absolument impeccable (une belle chemise, de beaux souliers, etc.), et là, ça sera vraiment la grande classe. Mais avec un vieux polo et un pantacourt, ça ne marchera pas.

2. Des lunettes de soleil plus sobres

Luca et Danilo Carnevale

Luca et Danilo Carnevale (non, ils ne sont pas de la même famille). Notez le petit pan de cravate plus long que le grand pan, un gimmick typiquement italien. Je suis cependant moins convaincu par le fait d'avoir autant de blanc dans une tenue.

Bekett & Robb Pitti 88

Voilà comment on s'habille en été à Florence, avec des matières qui semblent légères et aérées. Remarquez également les pantalons taille haute et l'usage des bretelles. Et oui, un costume beige avec une chemise bleu, c'est la classe absolue !

Je ne m'y attendais pas du tout. En effet, l'hiver dernier (en janvier 2015), tout le monde portait des lunettes de soleil aux verres miroir bleutés, et je ne pensais pas que cette tendance serait aussi vite oubliée cet été. On est donc de retour sur des lunettes plus simples, avec de petits verres, et une majorité écrasante de branches à effet "écaille".

Faisabilité en France : vous le faites déjà ! Le moins qu'on puisse dire, c'est que les Français ne sont pas les plus exubérants en matière de solaires. Pour ceux qui n'ont pas encore passé le cap de l'achat d'une belle paire de solaires, vous pouvez commencer en douceur avec une paire de Jimmy Fairly ou de Persol.

3. Le costume trois pièces en été

Même en été, sous un soleil de plomb, nombreux étaient ceux qui déambulaient en costume trois pièces. J'avoue que ce n'est pas ce qu'il y a de plus pratique en été, mais si vous voulez que les portes du Pitti s'ouvrent à vous, il va falloir apporter un trois pièces dans votre valise.

Faisabilité en France : impensable. Bien rares sont les costumes trois pièces dans la rue en France, alors en été... Vous avez intérêt à prendre des matières très respirantes, comme des laines légères et/ou du lin.

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Même à plus de 30°C, Alessandro Squarzi est en trois pièces, mais sans cravate et sans pochette.

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Autre gimmick stylistique qu'on ne trouve qu'au Pitti : le pantalon et le gilet sont assortis, mais la veste est dans une matière différente, afin d'apporter un peu de variété dans la tenue (et d'éviter d'avoir une surcharge visuelle de motifs). Par contre, il faut avoir un sacré flair pour trouver LA couleur de veste qui matche parfaitement avec un pantalon et un gilet. Ici, Samir de Bureza a tapé dans le mille !

4. La chemise sans cravate

Frank Galluci ici donne l'exemple.

Frank Galluci donne l'exemple ici.

Mariano Di Vaio Pitti Uomo 88

Mariano Di Vaio, célèbre mannequin, et ses légendaires dents blanches. Je suis moins fan des larges rayures par contre.

Luca Rubinacci n'a pas non plus de cravate, ni de col d'ailleurs !

Luca Rubinacci n'a pas non plus de cravate, ni de col d'ailleurs ! Vous verrez son interview vidéo d'ici peu.

Je n'avais pas souvenir d'avoir vu aussi peu de cravates l'été dernier, et encore moins en janvier dernier. Mais là, force est de constater que de nombreux hommes avaient des tenues impeccables de bout en bout (pochette, bracelets, souliers parfaitement cirés, etc.), mais sans cravate ! C'est ce qui m'a conforté dans l'idée que ce Pitti était plus simple et décontracté que l'été dernier.

Point TRÈS important : dans les tenues, il y a deux boutons, qui sont systématiquement ouverts. C'est celui du col (qui est en contact avec le noeud de cravate, si vous en mettez une) et celui juste en dessous. Surtout, surtout : pensez bien à faire de même. Si vous laissez uniquement votre bouton de col ouvert, le résultat est franchement raté et fait penser à un homme qui n'ose pas se laisser aller à une toute petite touche de spontanéité (ou alors ça fait salary man qui sort du bureau, et qui enlève sa cravate pour s'acheter un peu de coolitude). Donc chemise portée sans cravate = deux boutons ouverts. Et c'est OBLIGATOIRE ! Pas d'excuses du type : on va voir mes poils, je montre trop de peau, etc.

Faisabilité en France : vous le faites déjà bien normalement !

Photo de Laurent Le Cam de Milanese Special Selection

Lino Ieluzzi sans cravate ! Crédit photo : Laurent Le Cam de Milanese Special Selection. Il intervient d'ailleurs sur notre reportage vidéo !

Même Lino, coutumier de ses habituelles cravates jaillissantes ornées du chiffre 7, s'offre une petite journée avec la chemise ouverte et une veste croisée : ça marche parfaitement ! Un vrai modèle d'inspiration si vous avez son âge...

5. Du lin partout (et des mélanges)

veste en lin

Pas de cravate, mais un col qui plonge parfaitement sous les revers...

Là, je suis sûr qu'il n'y avait pas autant de veste en lin l'été dernier. Il s'agit vraisemblablement de différents mélanges lin/laine, car j'ai trouvé qu'il froissait assez peu (ou alors, c'est du lin très haut de gamme). Pour contrecasser le côté "mou" du lin, la veste doit être parfaitement coupée, sinon c'est vite raté. Mais quand c'est bien fait, vous faites face à l'élégance estivale ultime, la vraie de vraie, celle où vous vous sentez invincible dans un restaurant en front de mer, en charmante compagnie.

Faisabilité en France : trouver une belle veste en lin en France, c'est compliqué ; donc ce n'est pas forcément la pièce qu'il faut absolument avoir selon moi. Sinon, je pense que vous trouverez votre bonheur chez Boggi et évidemment SuitSupply. Si vous voulez le top du top, Husbands propose de très beaux costumes en lin.

Les classiques du Pitti qui ne bougent jamais

  • La veste croisée

Impossible d'aller au Pitti sans veste de blazer croisée, même en été ! Les paddings aux épaules sont cependant très légers, ce qui donne une silhouette plus naturelle, et plus appréciable pour une pièce aussi structurante et géométrique.

Lino Ieluzzi veste croisée

Lino est un immense fan des vestes croisées (et d'accessoires), qu'il choisit toujours très claires. C'est une tenue élégante et estivale, bien bien difficile à porter sans la gueule et la décontraction qui vont avec.

  • Le pantalon court

La longueur des pantalons fait souvent débat au Pitti, car certains sont quand même très courts. Mais c'est complètement italien comme manière de faire, ils adorent s'aérer les chevilles. Une tendance totalement incompréhensible pour nous les Français.

  • Les mocassins

Justement, parce que les pantalons sont courts et qu'il fait chaud, difficile de porter des Richelieu ou des derby (certains le font pour avoir un côté plus "mode"), alors le soulier qui règne en maître au Pitti, c'est le mocassin. Ils sont fins et effilés, et se portent évidemment sans chaussettes.

Loafers

Les Loafers de Giorgio Giangiulio, que je n'ai jamais vu porter autre chose que des motifs et des carreaux.

Attention : en anglais, on distingue mocassin et loafer ; donc si j'écrivais cet article en anglais, j'aurais plutôt parlé de loafer.

  • Le pantalon blanc

Avec la veste croisée, c'est l'autre pièce indispensable du Pitti, même en hiver ! Le pantalon blanc est systématiquement porté de manière très élégante : avec blazer, chemise et cravate, afin de bien contraster avec sa connotation "vacances". Indiscutablement, c'est une pièce que j'aimerais voir plus souvent en France.

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Comme à leur habitude au Pitti, les Japonais se sont parfaitement appropriés les codes sartoriaux occidentaux (bien mieux que certains Français).

  • La chemise en denim

Comme je l'ai répété plusieurs fois, la majorité des chemises au Pitti sont blanches ou bleues (avec toutes les déclinaisons de rayures et de matières possibles). Pour y apporter de la variété, certains ont une chemise dans un denim très léger (au moins autant qu'une popeline), qui se délave avec le temps. Avec un col cutaway et une cravate tricotée, le résultat est magnifique. Ou comment mélanger avec beaucoup de justesse décontraction et élégance.

chemise en denim pitti 88

Comme le fait remarquer Sonya de PG, nombreux étaient les hommes avec des pantalons à la taille haute bien marquée.

  • Les bracelets

J'avoue que le Pitti m'a donné le virus des bracelets, et m'a totalement décomplexé d'en porter six ou sept sur le même poignet (même si la France a une conception de l'élégance discrète, qui ne doit pas faire de vagues). Au Pitti, les bracelets semblent être un passage obligatoire quand vous portez un costume, toujours dans le but d'apporter une touche d'inattendu et un grain de folie dans une tenue.

bracelets Pitti Uomo 88

On retrouve beaucoup de turquoise sur les bracelets.

Et ce n'est pas Lino qui dira le contraire :

#linoieluzzi #albazarmilano #7style

Une photo publiée par Lino Ieluzzi Official (@linoieluzziofficial) le

Rendez-vous dès demain pour notre tant attendu reportage vidéo du Pitti 😉

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