Mon voyage au royaume du techwear : l’ISPO

8 min

Mon voyage au royaume du techwear : l’ISPO

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Publié le : 11 février 2019Mis à jour le : 16 février 2019

Disclaimer : cet article va parler de matières techniques, donc ne le lisez pas si vous y êtes allergique. Cela dit, impossible de faire autrement, car c'était précisément un salon entièrement dédié au technique.

L'une des parties que j'aime le plus dans mon métier de création ? Les salons professionnels.

J'aime arpenter les allées, découvrir des nouveautés, prendre le temps de poser toutes les questions techniques que je veux aux professionnels sur place.

Si j'ai fait quelques salons très "conventionnels", à savoir des salons présentant des tissus de chemises, de costumes ou de manteaux, avec Julien on a eu envie d'élargir nos horizons, notamment sur des matières plus techniques.

Et pour ça, il y a un salon incontournable : l'ISPO à Munich.

Très sincèrement, on n'y est pas allés en se disant "faut absolument qu'on ramène du Gore-Tex pour nos prochaines sorties !!! " Non, c'était plutôt dans une optique de découverte, je vais vous raconter tout ça.

Quelle est l'ambiance par rapport au Pitti ?

C'est un salon outdoor donc, par essence, il n'y a que des vêtements très confortables, chauds, techniques, réconfortants et cela se ressent dans l'ambiance, qui est franchement décontractée.

L'outdoor, c'est le sport, c'est l'évasion, c'est le technique, c'est donc un ADN qui n'a rien à voir avec un salon sartorial.

Pas de tenues sartoriales tirées à quatre épingles. Les blazers sont d'ailleurs plutôt rares. On sent que personne ne vient pour se montrer ou afficher sa tenue. Tout le contraire du Pitti Uomo, où nous étions en janvier, et dont voici le débrief.

L'ISPO, qu'est-ce que c'est ?

Un salon de l'outdoor est obligé d'avoir de la neige.

À l'ISPO à Munich, des acheteurs du monde entier viennent découvrir les nouvelles collections de marques comme Arc'téryx, Descente, Black Diamond, Patagonia, Black Yak, Mammut, Rab, The North Face, Peak Performance, etc.

Ces marques ne vous disent rien ? C'est normal, car ce sont des marques de ski, de randonnée, d'alpinisme, d'escalade, etc.

Le stand d'Arc'teryx était immense ! Chose amusante, le haut de gamme de la marque (Veilance) était présenté au Pitti, mais pas à l'ISPO. Une seule marque, deux gammes, deux salons.

Bref, absolument pas des marques qui sont dans l'écosystème de BonneGueule, sauf si un jour on se lance dans la comparaison de baudriers d'escalade ou de vestes de randonnée.

Autre particularité, les fournisseurs de matières techniques sont également présents : Sympatex, Schoeller, Polartec, Climashield, Toray et d'autres et, évidemment, Gore-Tex. C'est souvent l'occasion de dévoiler leurs dernières nouveautés, comme pour Polartec.

Pour le dire autrement, c'est un peu comme si le Pitti (salon où les marques présentent leurs collections) fusionnait avec Première Vision (salon où les fournisseurs présentent leurs nouveaux tissus) pour ne faire qu'un seul — et gigantesque — salon.

Pourquoi sommes-nous allés là bas ?

Alors je vous rassure de suite : ce n'est pas pour transformer BonneGueule en marque de ski (d'ailleurs je ne suis pas skieur). Ni pour se lancer dans la randonnée et l'escalade. Ni même pour mettre du techwear partout.

On avait deux objectifs :

  • rencontrer des fournisseurs de matières techniques
  • rencontrer des fabricants qui maîtrisent la technique des coutures soudées.

Enfin, je pense que dans le métier que l'on fait, c'est important de garder l'esprit ouvert et de se nourrir d'inspirations très différentes. J'adore aller au Pitti, mais ça ne doit pas de me détourner de ce qui se fait ailleurs, dans un univers comme l'outdoor par exemple.

Voilà ce qu'on a vu

Pertex, Tilak et du café

Pertex m'intriguait, car on retrouve beaucoup de leurs tissus utilisés pour de la doublure (mais pas seulement).

Ils sont spécialisés dans les nylons très fins où l'air et l'humidité peuvent facilement circuler, ce qui est très pratique pour les doudounes avec du duvet ou autre isolant.

C'est une marque avec une histoire de dingue. Cependant, le fait de venir sans rdv (comme on peut le faire à Première Vision) n'était pas l'idée du siècle et je n'ai eu qu'un mince aperçu de leurs technologies.

L'ISPO, c'est aussi des petites installations qui permettent de montrer les propriétés techniques des matières, comme c'est le cas ici sur ce tissu Páramo.

Presque par hasard je tombe sur Tilak, le Arc'téryx tchèque qui fait des pièces outdoor parfaitement exécutées. ?Avec la participation d'Acronym sur certaines créations. J'ai presque eu envie de me prendre une Raptor Jacket, mais, comme souvent, cette marque est introuvable en France.

Puis un peu par hasard, en se promenant dans les allées, on tombe sur Singtex, un fournisseur taïwanais qui récupère tous les déchets de café de Starbucks et autres coffee shops et qui en fait des tissus techniques, comme des polaires.

Pendant le procédé de recyclage, ils arrivent même à récupérer l'huile de café pour… en faire des membranes imperméables. J'étais impressionné.

Et puis à un moment dans la brume... Gore-Tex !

J'étais impatient de les rencontrer et… en fait rien.

Ils ont certes un stand immense, mais à ma très grande surprise, c'était plus un "hub" de rencontres qu'un stand de présentation de matières. Il y avait quelques vestes, quelques gants et quelques chaussures et c'est tout. Pas de rack remplis de leurs tissus dans différents coloris.

Comme chez Pertex, c'est le genre d'endroit où il est quasiment impératif de prendre rdv, ce qui n'était pas notre cas.

Cela dit, ça m'a permis de rencontrer Hélène, qui s'occupe des relations presse de Gore-Tex en France pour un échange très intéressant et d'établir un premier contact avec la marque.

J'ai pu également manipuler toutes les coutures de leur nouvelle technologie pour les chaussures : le Gore-Tex Invisible Fit. Cela permet de rendre des chaussures imperméables, mais sans cette fameuse doublure argentée très voyante.

C'est très intéressant et ça promet des modèles séduisants, même pour un usage urbain.

Et qu'est-ce qu'on trouve à côté de Gore-Tex ? Le stand Granger's ! Cette marque fournit des produits d'entretien spécialement adaptés aux matières techniques et notamment pour redonner de la déperlance.

La rencontre imprévue avec AustriAlpin

Là on atteint des sommets de geekerie…

AustriAlpin est le fabricant d'une boucle de ceinture culte chez les fans de techwear : la fameuse boucle Cobra, d'ailleurs visible sur les costumes de super héros dans les blockbusters américains.

Deux boucles Cobra se cachent dans cette photo, saurez-vous les retrouver ?

Pourquoi un tel engouement pour cette boucle, dont Alyx et Dior se sont très fortement inspirés ?

Une ceinture Dior, dessinée par Alyx, qui s'inspire beaucoup d'une boucle Cobra.

À l'utilisation, son cliquetis est exquis. Son design, conçu pour résister à 200 tonnes de traction, a une forme très particulière. Et puis c'est une boucle qui permet de relâcher facilement quelques centimètres si on a trop mangé au restaurant.

Le premier jour, j'envoie un message à AustriAlpin sur Instagram pour savoir s'ils sont sur le salon. Très rapidement, on me répond qu'ils n'ont pas de stand, mais que Helmut, un de leurs collaborateurs est sur place. Et deux heures plus tard, entre deux allées, on se fait un rendez-vous improvisé, avec un tabouret entre nous pour qu'il puisse poser ses échantillons.

J'étais ravi de voir les différentes tailles possibles : la plus petite taille trouverait facilement sa place sur un sac, tandis que la plus grosse était vraiment très… grosse.

Helmut nous l'a dit en rigolant : "si vous n'avez pas besoin de suspendre des personnes en l'air, vous n'avez pas besoin d'avoir une boucle aussi grosse".

Bien que cette boucle connaisse une hype fracassante dans le monde du streetwear, et à moins qu'on me réclame des ceintures Cobra dans les commentaires, je n'ai pas envie de faire fuir tout le monde en proposant une ceinture Cobra frappée BonneGueule, vous pouvez dormir tranquille !

Et de mon côté, je continue à porter ma Klik quasiment chaque jour et tout va bien.

Polartec : leur Power Air

L'immense stand Polartec, qui a mis à mal mes talents de photographe en herbe.

Polartec suit actuellement le même chemin que Gore-Tex : ils veulent entrer de plus en plus dans des marchés dits "lifestyle", urbains ou "active wear".

C'est pour cette raison que notre blouson Jules Tournier avec une isolation (invisible) en Polartec Alpha était présent sur le stand !

Leur nouveauté majeure, c'était le Power Air : un tissu assez curieux composé de petites "bulles" renfermant des fibres isolantes en polyester.

Deux hoodies en Power Air étaient exhibés sur le stand, venant de chez Adidas et de chez Houdini.

C'est LA nouveauté de Polartec, du Power Air utilisé par la gamme Terrex d'Adidas.

J'ai également rencontré le technicien des membranes chez Polartec, pour une discussion très intéressante sur ce qui était techniquement possible. A suivre…

L'allée urbaine : technique mais portable dans la vie de tous les jours !

Et ce sont deux pièces (rarissimes) Acronym qui ouvrent cette allée consacrée aux pièces techniques urbaines.

C'était ce que je voulais voir : toutes les pièces techniques ET urbaines étaient présentées dans une longue allée.

A gauche, parka Nike ACG. Au milieu, le mannequin semble porter des New Balance x Norse Projects x Gore-Tex. Et à droite, je crois que c'est un manteau en Polartec de la marque japonaise Undercover.

Et très franchement, ils ont vraiment bien fait leur job, car la sélection était super pointue. Elle débutait d'ailleurs par deux vestes Acronym, puis par du Nonnative, du Nanamica, du Arc'teryx Veilance, du Stone Island, du Adidas…

Sans s'en apercevoir, ils ont fait une très belle haie d'honneur au techwear.

Une veste militaire de la marque japonaise "Nonnative". Sa présence est surprenante, car bien qu'elle soit très jolie, cette veste n'a pas grand-chose de technique.

Un modèle de Converse en Gore-Tex, qui a sa place dans une tenue bien streetwear.

Une très belle parka urbaine de la marque Peak Performance, pleine de finitions réjouissantes.

Un grosse surprise : le pavillon chinois

L'immense pavillon chinois qui regroupe des fabricants de choses diverses et variées. Ici pour des bonnets péruviens ou des casquettes.

C'est ma grosse surprise sur ce salon !

Un bon tiers était occupé par des fournisseurs chinois de matériel sportif en tout genre : ballons de foot, maillots, protège-tibias mais aussi tapis de course, matériel de musculation, équipement de cricket et j'en passe.

Comme si la Chine était finalement l'équipementier du monde entier.

Après la surprise, une déception : les fabricants

Je dois bien le dire, j'étais déçu.

On a parcouru le salon de long en large, mais impossible de mettre la main sur une usine européenne qui pratique les coutures soudées. Des usines il y en avait, mais elles étaient toutes chinoises. En désespoir de cause, je suis même allé chez un fabricant de bandes étanches, pensant qu'il connaissait sûrement des usines en Europe.

Sa réponse fut cinglante : "Désolé les gars, toute la techno a été investie en Chine, surtout au Vietnam. Ce sont eux qui ont les meilleures machines et les compétences."

Bon ben ça a le mérite d'être clair. Tous nos espoirs se tournent maintenant vers le Portugal (Canada Goose et Isaora font leurs vêtements aux coutures soudées là-bas), mais ce n'est pas gagné…

Heureusement, notre parka et notre softshell sont fabriquées en Roumanie.

Le salon Performance Days en mai prochain, toujours à Munich, semble être plus porté sur les matières techniques. A voir si on y fait un tour…

Les trucs marrants à l'ISPO

Parfois, le salon regorge d'inventions en tout genre :

Le genre de produit totalement improbable qu'on ne rencontre qu'à l'ISPO. Ici, des "chaussettes chaussures" Skinners.

Bonus : le contenu de mon sac à dos

J'ai voulu faire très simple et minimaliste : ne pas prendre de valise, juste mon sac Axiom 20. Et s'il y a bien un salon où on peut venir habillé décontracté, c'est celui-là. Pas question de s'embêter à prendre de la chemise et du blazer.

Je n'ai jamais vu autant de Salomon SpeedCross au mètre carré.

J'ai donc pris :

  • 2 tee-shirts en laine mérinos (impossible pour moi de faire un voyage sans en prendre un)
  • 1 gilet zippé techmerinos Zegna Sport
  • notre bomber Travel Tech en Power Stretch Pro, toujours aussi miraculeux dans ce genre de contexte
  • 1 pantalon Outdoor Voices (j'en suis accro), absolument parfait pour les 5h30 de train et pour chiller dans le AirBnB le soir après une journée intense de salon dans les jambes
  • mon fidèle jean Two Years de chez Orslow
  • la ceinture Cobra de Klik Belts, qui s'est révélée de circonstance quand on a rencontré le commercial de Cobra
  • 1 packing cube Muji pour tout mettre dedans
  • 1 paire de New Balance (erreur de ma part, j'aurai dû prendre mes Adidas Gore-Tex, plus adaptées au contexte de ce salon et surtout, À LA NEIGE ! )
  • la trousse de toilette en Dyneema Zpacks
  • la crème coiffante Horace (que j'ai magnifiquement oublié au Airbnb)
  • la parka BonneGueule contre la neige et le froid
  • + tout l'électronique

C'est une configuration dont je suis plutôt satisfait ! Dont tu peux retrouver une partie des éléments ici.

De retour l'année prochaine ?

J'ai apprécié ce salon, entre son ambiance décontractée et ses produits très pointus. J'ai évidemment envie d'y retourner mais avant, avec Julien, je dois voir si c'est pertinent pour nous, car chaque salon représente un budget non négligeable.

Finalement, je retiendrai un vent de créativité qui souffle sur ces vêtements techniques et de plus en plus urbains : il y a de la couleur, de l'audace au niveau des coupes et des fonctionnalités toujours plus travaillées.

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