Couture : Comment faire un ourlet invisible ?

5 min

Couture : Comment faire un ourlet invisible ?

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Publié le : 16 novembre 2012Mis à jour le : 18 mars 2020

Cet article est destiné à tous les hommes volontaires qui ont besoin d’ourlets invisibles.

Je vais vous apprendre aujourd'hui à faire vos ourlets de pantalons vous-même.

De quel ourlet parle-t-on ?

Ourlets invisibles, revers apparents, New-York cuff, rouloté, il existe beaucoup de manières de faire la jonction entre le pantalon et les chaussures. Le choix se fait en fonction de la morphologie, de la nature des chaussures, des vêtements et du style recherché mais aussi de l’environnement. Observez les hommes élégants qui marchent dans la rue : à Milan, ils aiment exhiber leurs chaussettes tandis qu’à Chicago, la tendance consiste à les recouvrir complètement.

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Le "Gilles" de Watteau - tableau exposé au Louvres

Quoi qu’il en soit, à l’ère du prêt-à-tout-porter, les hommes honnêtes sont obligés de raccourcir leurs pantalons pour les ajuster à leur propre taille.

Tous les pantalons ne tomberont pas forcément pile poil à la bonne longueur pour vous. Chino BonneGueule

Par la suite, vous allez apprendre à retoucher un pantalon à l’aide d’un ourlet invisible tel que celui du mannequin sur la photo ci-dessus. Pour illustrer cet article, je vais travailler un pantalon en flanelle grise que je viens d’acheter à Londres en détaillant, étape par étape, une manière plus solide et élégante que celle de votre couturière de faire un ourlet invisible.

Besoin de conseils pour connaître la bonne longueur pour votre pantalon ? Nos conseils ici.

Le nécessaire à coudre


Sachez dans un premier temps que tout gentleman digne de ce nom possède, dans son équipement de couture de survie :

  • une dizaine d’aiguilles à broder les plus fines possibles,
  • une petite boîte d’épingles,
  • un dé à coudre,
  • une petite paire de ciseaux de couture (ne coupez jamais rien d'autre que du fil ou du tissu avec)
  • des bobines de fil de couleurs basiques, les plus fins et solides possibles
  • un mètre ruban.

Avant-propos important pour la suite :

  • l’endroit d’un tissu est sa partie qui est visible, l’envers est a contrario la partie intérieure ;
  • la trame est la structure selon laquelle les fils sont tissés ensemble pour obtenir le tissu.

La méthode pour faire son ourlet soi-même

Maintenant que vous êtes muni d’une aiguille la plus fine possible et d’un fil de la couleur de votre pantalon à retoucher, il est temps de vous retrousser les manches et de vous lancer.

Commencez d’abord par poser cette aiguille ou vous allez vous blesser. Mettez votre pantalon, ajustez convenablement votre ceinture (à la bonne hauteur sur vos hanches), puis rentrez le surplus de tissu à l’intérieur d’une jambe, envers contre envers, jusqu’à la hauteur d’ourlet souhaitée. Le tissu contre votre jambe ne doit pas être froissé. Nette, la pliure doit être perpendiculaire à l’axe de la jambe. A l’aide d’une épingle devant et d’une autre derrière, piquez grossièrement sur l’endroit de sorte que les tissus restent en place. Ce marquage sommaire va servir d’étalon. Vous pouvez ôter votre pantalon et le retourner entièrement, avec soin, sinon vous allez vraiment vous blesser. Travaillez désormais sur un support large et sous une forte source lumineuse.

Avant toute chose, faites des mesures de la longueur de tissu que vous avez replié sur tout le périmètre de l’ouverture de jambe. Vous obtiendrez des valeurs qui diffèrent légèrement de plus ou moins un centimètre. Faites la moyenne et notez ce chiffre quelque part, ce sera la mesure de référence que vous allez appliquer très exactement sur les deux jambes.

Retirez les deux épingles qui maintiennent les tissus en place et disposez-en de nouvelles verticalement (dans l’axe de la jambe) en prenant soin de respecter systématiquement la longueur de référence. Une petite dizaine d’épingles suffit à maintenir parfaitement les deux tissus l’un contre l’autre. A présent, disposez régulièrement des épingles à l’horizontal tout le long de la tangente à la pliure.

Faites attention à attraper le moins possible de tissu dans ces épingles-là de sorte que, lorsque vous aurez retiré toutes les épingles verticales, vous puissiez déplier la jambe entièrement sans qu’il n’y ait de faux plis. Cela vous permettra de faire le revers un peu plus tard.

Avec votre paire de ciseaux de couture, coupez le tissu afin qu’il reste 6 centimètres après la ligne d’épingle. Cette longueur constitue une marge de sécurité si le tissu venait à rétrécir parce que vous n’auriez pas suivi les conseils d’entretien de Benoît.

Tant que vous y êtes, mettez le surplus de tissu de côté, il sera le bienvenu lorsque vous devrez réparer une déchirure accidentelle. A propos de mon pantalon, comme vous pouvez le constater sur la photo, je n’ai pas eu à couper le tissu parce qu’il y avait approximativement 6 centimètres à enlever.

De toute façon, je ne déchire jamais mes pantalons de manière accidentelle. La rumeur qui colporte que j'en ai déjà craqué un sur scène n'est qu'un tissu de mensonge.

Pliez le tissu au niveau des épingles, envers contre envers, et pliez encore la partie intérieure sur elle-même pour obtenir une épaisseur triple sur 3 centimètres. Maintenez la structure à l’aide d’une nouvelle série d’épingles verticales. Sans rire : c’est le moment où l’on se blesse pour de vrai et où l’on jure contre ces maudites épingles horizontales.

Alors n’hésitez pas à les enlever au fur et à mesure que vous repliez le tissu sur lui-même. Cette épaisseur intérieure s’appelle le revers.

C’est le moment de récupérer l’aiguille que vous aviez préparée au début de ce billet. Bien entendu, vous n’y enfilerez jamais un morceau de fil plus grand que votre bras, c’est la règle. A propos, si vous n’avez pas trouvé un fil de la couleur exacte de votre pantalon, choisissez la couleur la plus proche et la plus sombre.

Pour marquer le départ, faites un point d’arrêt sur l’endroit du revers : piquez plusieurs fois au même endroit (3 ou 4 points suffisent).

Le point de chausson est la clé de voûte de l'ourlet invisible. Ce point permet de maintenir deux tissus l’un contre l’autre de la manière la moins visible possible. Gardez en tête le schéma suivant pour vous souvenir du principe général de ce point de couture qui est un point qui progresse dans le sens inverse du sens de piquage.

A titre d’exemple, un couturier droitier qui fait un point de chausson tient l’aiguille dans sa main droite, pique de la droite vers la gauche, emmène le fil à droite, pique de nouveau de la droite vers la gauche, etc. Le schéma ci-dessus est traité du point de vue des droitiers mais, pour ces personnes indignes de confiance que sont les gauchers, il suffit d’appliquer une symétrie axiale.

Dans le cas de l’ourlet invisible, le point de chausson est constitué d’un « petit » point sur l’envers (bleu sur le schéma) de la jambe et d’un « gros » point qui traverse le revers. Le petit point signifie que l’aiguille passe sous le moins de fils possibles de la trame (repère rouge ci-dessous). A l’inverse, le gros point indique que l’aiguille traverse entièrement la trame des deux épaisseurs du revers.

Surtout, rappelez-vous la règle d’or : ne jamais serrer le point pour éviter de marquer l’endroit du pantalon d’une ligne inesthétique sur l’endroit de la jambe telle que ci-dessous.

(note de Benoit : c'est bien la première fois que je vois de telles chaussures !)

Cela suppose de travailler avec une souplesse que vous allez vous approprier en pratiquant. D'ailleurs, vérifiez que vous ne marquez pas l'envers du pantalon en retournant la jambe au bout de quelques points. N'hésitez pas à recommencer si vous n'êtes pas satisfait.

Si vous souhaitez que l’ourlet soit très solide, espacez vos points d’un centimètre ou moins. Si vous préférez aller vite, vous pouvez aller jusqu’à 2 centimètres.

Une fois que vous avez fait tout le tour de l’ourlet et que vous êtes revenus au point d’origine, terminez par un point d’arrêt.

Procédez au repassage. Attention, même si vous respectez la température indiquée sur son étiquette, je vous conseille fortement de repasser le pantalon en mettant un torchon entre le fer et le tissu. Cela lui évitera de lustrer de manière irréversible.

Si vous voulez appliquer une technique séculaire de ninja, vous pouvez humidifier le torchon avant de passer le fer dessus. Cette méthode dite de la « pattemouille » représente la meilleure manière de repasser à la vapeur - d’ailleurs, en haute couture, il est hors de question d’envoyer la vapeur directement avec un fer.

Après avoir répété la même opération sur l’autre jambe en appliquant la même longueur de référence, vous obtenez ce résultat : aucune marque de rétrécissement du pantalon n’est perceptible.

Bravo, votre mission est accomplie avec brio.

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