Vacances : Paris – Istanbul à vélo, les sacoches, les pédales semi-auto et les réparations (V)
Ceci est le cinquième article sur le voyage à vélo entre Paris et Istanbul réalisé par Romain et Geoffrey. Pour retrouver les épisodes précédents, suivez le guide :
1 – le départ et le matériel de voyage en vélo,
2 – la fatigue et l’alimentation du cycliste,
3 - le train, la tente et le couchage
4 - les vêtements techniques, la protection de la peau et les panneaux solaires
5 - les sacoches, les pédales semi-auto et la réparation à vélo
6 - la parka, la polaire et les sacoches home-made
7 - les lunettes, la libellule et Istanbul
Dans cet article, nous poursuivons notre descente du Danube et voyageons de l'Autriche à la Hongrie en passant par la Slovaquie. Des pâtisseries viennoises aux beuveries de Bratislava, des thermes de Budapest jusqu'à la gare de Belgrade, nous vous présentons un peu plus notre matériel de voyage ainsi que des techniques de samouraï que nous avons développées pour déjouer le mauvais sort.

Et bam : 1523 km.

Vienne - Belgrade : 464km de vélo.
De Vienne à Bratislava
Pour rejoindre Bratislava depuis Vienne, rien de plus simple : il suffit de suivre le Danube sur une soixantaine de kilomètres.
La route n'est pas tellement intéressante sur le plan du paysage puisqu'elle traverse de larges zones industrielles - quoiqu'on puisse se sentir inspiré par cette profusion de métal et de vapeur.

Ce n'est pas étonnant que ces gros bâtiments se situent en aval de la capitale. De la sorte, la pollution du Danube inhérente à l'activité industrielle ne passe pas au coeur de Vienne.
Quand on s'est habitué à faire des étapes de plus de 100 kilomètres, la distance entre Vienne et Bratislava semble extrêmement courte.

Le poste frontière désaffecté n'offre guère plus qu'un pilone pour tout symbole de démarcation entre Autriche et Slovaquie. Au loin, la capitale slovaque se dessine entre les arbres.

Le Danube peut s'avérer gigantesque à certains endroits !
Bratislava
Bien qu'elle ait été la capitale de la grande Hongrie pendant plusieurs centaines d'année, Bratislava ne nous apparaît pas très grande, en comparaison de Vienne que nous avons quitté le matin-même.
Cette capitale a une dimension provinciale qui la rend néanmoins agréable à parcourir à vélo.

Pendant un moment, on a pu douter être dans une capitale. Mais, au détour d'un sous-terrain, on a constaté qu'on était bien à Bratislava.
Du point de vue architectural, Bratislava se partage entre d'imposantes constructions du XXème siècle, des édifices ultra modernes, et quelques bâtiments médiévaux épars.
Cette incohérence apparente fait tout le charme d'une ville dont on sent que l'urbanisation est en plein essor.

Les multiples sculptures métalliques de Radko Macuha sont surprenantes. Je recommande l'expérience de tomber nez à nez avec l'un de ces personnages au détour d'une ruelle.
Pour se laisser emporter par le dynamisme de Bratislava, il suffit de se balader dans la vieille ville à la tombée de la nuit.

C'est à ce moment-là que les hordes d'étudiants Erasmus se retrouvent pour faire la tournée des bars et des discothèques qui fourmillent dans les vieilles rues pavées.
Le lendemain de notre arrivée, nous décidons de plier sacoche et de repartir vers l'aventure.
Les sacoches de Geoffrey
Au terme d'une longue recherche sur internet, Geoffrey a choisi un set de trois sacoches Foxline en promo (moins de 100 euros) sur lecyclo.com.

Le pack Foxline monté sur un porte-bagage.
Cet ensemble présentait au moins trois avantages :
- une contenance importante : 30 litres x 3 = 90L de stockage,
- une imperméabilité à l'eau de l'ensemble,
- un prix relativement modeste (de bonnes sacoches peuvent vite coûter très cher).
A gauche : vue de l'une des deux sacoches latérales ; on vient clipser les deux crochets de la sacoche sur le porte-bagage
A droite : la sacoche supérieure (qui peut aussi servir de sac à dos avec ses deux lanières) ; on vient la clipser sur les deux sacoches latérales.
Le tissu et les coutures totalement étanches sont un vrai plus, quoiqu'il ne faille jamais laisser le moindre vêtement humide à l'intérieur au risque d'avoir de mauvaises surprises (la sacoche étanche chauffe au soleil, et le vêtement humide rend alors toutes vos autres affaires moites !).
En revanche, les sacoches manquent de rangement intérieur et le fait de devoir tasser ses affaires verticalement rend l'accès au contenu fastidieux.

Bien que très robuste, le tissu des sacoches a fini par s'ouvrir. Il faut dire que Geoffrey leur en a fait voir des vertes et des pas mûres, entre chemins de bourrin et obstacles à pleine balle.
Note de Geoffrey : ...ce que j'ai bien regretté quand je devais réparer avec Romain les sacoches tous les 50km lors des dernières étapes, de peur qu'elles ne puissent plus du tout se fixer. Une vraie source de stress !
Pour finir, le système d'accroche en plastique est relativement fragile : celui de Geoffrey a laché à la moitié du voyage.
Bien que nous ayons probablement surchargé les sacoches, il a fallu que nous improvisions pour limiter les dégâts et pouvoir continuer notre route lorsqu'elles ont menacé de tomber par terre.
La réparation
Lorsqu'on entreprend de faire un tel voyage à vélo, la probabilité d'avoir un problème technique est très élevée, aussi bénin soit-il. Cela suppose de devoir bricoler afin de pouvoir poursuivre son expédition.
L'écueil consiste à s'équiper d'un matériel de réparation tellement exhaustif qu'il serait trop lourd à porter. Alors évitez d'emporter votre set complet de tournevis et de clés à molette et optez pour l'essentiel :
- un ensemble multifonction aussi compact et léger que possible avec tournevis et clé Alen, comme ce modèle Btwin,
- un couteau de voyage qui coupe bien (Geoffrey adore son couteau tactique Leatherman)
- une petite pince,
- une bobine de fil et une aiguille pour les petites - mais non moins essentielles - reprises,
- un rouleau de scotch bourrin de type gaffer (pas la peine de prendre un rouleau entier, trop lourd et encombrant),
- et le plus important pour la fin : une bobine de fil de fer (pas trop grosse non plus, juste de quoi bricoler).
Pour s'assurer que les sacoches de Geoffrey ne tombent pas avant la fin du voyage, il a fallu bricoler un système suffisamment solide avec un fil de fer costaud (qui est en fait de la corde à linge, achetée à Vienne dans un magasin "tout à 1€").

Le saucissonnage final, vu du dessus. Si vous regardez bien au centre, vous pourrez apercevoir une fourchette qui nous a servi de levier.

Le point le plus important a consisté à attacher les barres de soutient des sacoches au porte-bagage (photo de gauche).
Bien que ce système D de l'extrême nous ait permis de ne pas abandonner les affaires de Geoffrey, il présentait l'inconvénient de ne pas pouvoir défaire les sacoches du vélo.
Pour ce qui concerne nos bécanes, nous n'avons pas eu le moindre pépin du voyage, exception faite de quelques déraillements et autres boulons à resserrer. Il faut dire que nous avons choisi des vélos simples, mais solides.
Le système de pédales semi-automatiques Btwin (vélo de Romain)
S'il y a bien un test qui me tenait particulièrement à coeur au moment de préparer le voyage, c'était bien celui du système de pédales semi-automatiques.
Ce terme technique désigne la nature particulière de la pédale : une de ses faces est équipée d'un système d'accroches pour chaussures adaptées, tandis que l'autre face est prévue pour des chaussures normales).

Les pédales semi-auto comportent un système de butée à ressort dans lequel le crochet de la chaussure peut se ficher.
Ce système est déconcertant lorsqu'on l'utilise pour la première fois. Rapidement, on commence à prendre le coup pour accrocher sa chaussure en appuyant de la bonne manière d'une part, et la décrocher avec un coup de cheville vers l'extérieur d'autre part.

Notez comme la semelle de la chaussure est épaisse. Cela permet de compenser l'espace nécessaire au système d'accroche en métal fiché sous la semelle.
Ce modèle de chaussures VTT 520 XC à 80 euros pièce est le modèle de milieu de gamme chez Decathlon.
Avec le recul, je trouve ce système de chaussures et pédales semi-automatiques vraiment efficace.

Sur cette photo, on peut admirer la tente de Geoffrey au second plan.
Bien que cela ait nécessité un temps d'adaptation, on s'habitue rapidement à une manière de pédaler qui présente un meilleur rendement que le système traditionnel sans accroche : le pied antérieur (qui ne pousse pas) tire la pédale en même temps que le pied postérieur exerce sa poussée.
En plus de répartir simultanément l’effort sur les deux jambes et d'améliorer le rendement, ce système a le mérite de faire travailler les muscles agonistes (quadriceps, fessiers) et antagonistes (ischio-jambiers, mollets) pour un travail musculaire plus harmonieux.
L'arrivée en Hongrie
A ce niveau-là du Danube, les pistes cyclables deviennent de moins en moins bien balisées. L'entretien des routes y est moins important, et les itinéraires à vélo d'autant plus confondus aux voies empruntées par les voitures et les camions.
Il faut redoubler de vigilance pour ne pas se paumer dans la campagne, ou finir aplati sous un camion.

Geoffrey écoute un podcast sur la dialectique stoïcienne : les podcasts de France Culture (notamment l'émission Le Gai Savoir) se téléchargent sur le téléphone et permettent de se cultiver sur les longues bandes de pistes cyclables, parfois trop monotones.
C'est à cette étape du voyage que les moustiques deviennent une vraie nuisance, leur témérité n'ayant d'égale que leur appétit pour nos cuissots dodus.
Nous sommes obligés de nous adapter : la journée, nous évitons de faire des pauses à l'ombre pour ne pas nous faire harceler. Le soir, nous portons systématiquement des vêtements longs et nous aspergeons de produit anti-moustique la peau découverte.

Petite astuce anti-froid, anti-coup de soleil et anti-moustique : le bandeau tour de cou Buff en microfibre (merci Lawrence pour le tuyau).

Très compact, ne pèse rien, sèche rapidement : ça a l'air bête, mais le bandeau s'impose rapidement comme un indispensable de toutes vos excursions sportives.
Les fortifications d'Igmánd
Nous passons la frontière entre la Slovaquie et la Hongrie au niveau de la ville de Komárno, située en face de son alter-ego hongroise, la ville de Komárom.
Autrefois, ces deux villes n'en faisaient qu'une mais elles furent séparées en 1920 lorsque le traité de Trianon fixa la frontière entre la Hongrie et la Tchécoslovaquie au niveau du Danube.
Ces villes jumelles ont la particularité de disposer de trois grands forts (Fort Monostor, Fort Igmand et Fort Csillag) qui constituent de remarquables monuments nationaux.

Pendant près d'un siècle, les forts de Komárom ont abrité les troupes de la monarchie austro-hongroise et de l’armée hongroise. Par la suite, ils ont servi d’arsenal secret aux troupes soviétiques entre 1945 et 1991.
La route de Budapest
Après avoir barboté dans les thermes de Komárom, nous décidons de reprendre la route en direction de la capitale hongroise.

Sur le chemin de Budapest, nous visitons Esztergom, une ville qui a joué un rôle important dans l'histoire de la Hongrie puisqu'elle en a été la capitale pendant trois siècles.

Certains bâtiments sont démesurés par rapport à l'importance actuelle de la ville. À l'image de Langres en France.

Ne posez pas la question : c'était pas le bon timing.
Nous avalons le 1300ème kilomètre de notre périple lorsque nous arrivons aux portes de Budapest.
Budapest
L'arrivée dans la mégapole de Budapest impressionne tant l'agglomération est tentaculaire, et pour cause : ses 2,5 millions d'habitants vivent sur une surface de plus de 550 kilomètres carrés (tandis que le pays tout entier compte moins de 10 millions d'âmes).

Essai de photo stylée : musée ethnographique sur la place du Parlement hongrois.
Fidèles à notre habitude de profiter des capitales, nous décidons de passer deux nuits dans cette ville extraordinaire. L'occasion de profiter notamment de l'architecture issue du métissage des techniques de construction de l'Europe occidentale avec l'architecture ottomane.
Cette escale à Budapest nous permet de tester ses thermes légendaires. Comme nous avons l'embarras du choix, nous choisissons de tester les Király Baths, des bains pittoresques plus fréquentés par les Hongrois que par les touristes.

Le dôme du bassin principal des Király Baths est hérité des constructions turques lors des conquêtes ottomanes du 16ème siècle.

La salle de détente propose une ambiance toute particulière, subtil mélange d'esprit soviétique et de vintage trendy.

Les petites cantines locales ne sont pas en reste : elles ne manquent pas de ce charme désuet.
Le vélo nous permet de faire de longues balades dans la ville, ainsi que sur les rives du Danube.

Ici, le Parlement s'illumine au couché du soleil et nous rappelle que nous passons notre dernière nuit dans la capitale hongroise.

Cette très belle capitale est construite sur les deux rives du Danube.
Le jour de notre départ de Budapest, nous faisons un point sur notre planning et prenons la décision de nous propulser en train à Belgrade. Cela nous permet d'éviter une section du fleuve réputée ennuyeuse et de poursuivre notre route dans la direction d'Istanbul.
Par ailleurs, au vu du temps qu'il nous reste, nous choisissons en lieu de grande étape finale de notre voyage la région mythique des portes de fer de Serbie, où le Danube se ressert subitement et passe au milieu de falaises de plusieurs centaines de mètres.
Nous sommes convaincus que ce canyon légendaire au fil duquel le Danube poursuit son chemin vers la Mer Noire constituera un sacré bout d'aventure... et de dénivelé !
Pour retrouver les autres épisodes, suivez le guide :
1 – le départ et le matériel de voyage en vélo,
2 – la fatigue et l’alimentation du cycliste,
3 - le train, la tente et le couchage
4 - les vêtements techniques, la protection de la peau et les panneaux solaires
5 - les sacoches, les pédales semi-auto et la réparation à vélo
6 - la parka, la polaire et les sacoches home-made
7 - les lunettes, la libellule et Istanbul
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