Test : Jacques & Déméter, les justiciers masqués de la chaussure

4 min

Test : Jacques & Déméter, les justiciers masqués de la chaussure

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Publié le : 8 décembre 2011Mis à jour le : 15 mars 2016

Avec l'essor du site, on reçoit des communiqués de presse en tout genre. Le dernier c'était un site de dating pour rencontrer des cougars. J'ai hésité, forcément, mais au dernier moment je me suis dit que vous présenter des petits créateurs quand ils font des choses abordables c'était pas mal aussi.

Jacques et Déméter brogues

Le montage goodyear de Jacques & Déméter.

C'est ainsi que j'ai rencontré "Jacques" et "Déméter" (les noms sont changés, mais en vrai ils ne portaient pas de masques). Jacques et Déméter, c'est un couple qui a décidé de tout plaquer pour lancer une marque de chaussures abordables, bien dessinées... avec inscrite en grosses lettres dans le cahier des charges la décision de produire en France.

Il y a 2 modèles pour l'instant (des derbys homme et des derbys femme), décliné chacun en 3 couleurs. Le modèle gris est pour moi le plus réussi :

La forme est épurée, élancée : ce sont des chaussures qui rallongent une silhouette sans pour autant tomber dans le symptôme des pieds pointus. Les ganses en cuir bleues assorties aux lacets donnent une petite touche électrique aux chaussures. Elles se portent facilement avec tout, à condition de ne pas avoir une tenue trop détaillée pour éviter la surcharge visuelle.

Les matériaux utilisés sont nobles (nubuck et cuir lisse de veau, doublure intérieure en chèvre)... et tout vient de France, de la tannerie du cuir au montage. J'aime beaucoup le concept du Made in France, de plus en plus en vogue en ce moment. Pas par chauvinisme mais parce que notre pays à un grand savoir-faire dans la confection de vêtements et le travail du cuir, et que ce serait dommage que tout ce savoir-faire se perde faute de commandes des créateurs.

Note perso : Il y a selon moi une notion de responsabilité à avoir quand on achète. Achat vert, équitable, bio ou production des bergers apicoles du Boutchikisthan : chacun sa paroisse. Mais il y a une notion à ne pas oublier : celle du mérite. Faire un produit de bonne qualité et au bon prix, sans bullshit marketing, ça se perd (je pense aux marques du Sentiers ou au "faux luxe" des D&G, Armani et autres marques plus présentes en villages de marques qu'en boutiques de qualité... tiens tiens comme c'est bizarre).

Le mérite de prendre des risques pour répondre simplement et humblement à une demande se perd, que ce soit dans des petits achats ou sur du milieu/haut de gamme, alors faites-vous la réflexion de temps en temps.

Notre avis sur la marque

Mais revenons-en à Jacques & Déméter : c'est bien pricé au global. Mon seul regret, c'est que les semelles soient collées (certes de manière solide et avec un savoir-faire derrière), mais collées quand même. Elles restent une bonne affaire si vous évitez de trop les maltraiter sous la pluie. Et le design comme le montage sont soignés.

Détail sympa : les deux collections se font écho (sans tomber dans du marketing à mèches à la Kooples, que je trouve agaçant). Les chaussures pour femmes sont très réussies elles- aussi.

L'interview de Jacques & Déméter

Pour compléter cet article, j'ai proposé aux créateurs un petit jeu hyper innovant de questions/réponses (ça se dit interview en anglais) :

Qui sont Jacques et Déméter ?

Déméter : Jacques c’est un épicurien un peu « tradi », un peu fou.
Jacques : Déméter c’est une créative en lutte perpétuelle contre le système.
Ensemble ils ont décidé de former un duo de justiciers de la chaussure française pour défendre les artisans et leur savoir-faire en alliant tradition et créativité.

Pourquoi avoir quitté vos anciens jobs ? Et comment avez-vous eu l'idée de vous lancer dans la chaussure ?

Jacques : Quand j’ai commencé à aller au boulot à reculons et à réfléchir à un moyen de me faire virer je me suis dis qu’il fallait changer !
Demeter : On aime les chaussures et on n’était pas complètement épanouis dans nos boulots respectifs. L’un dans l’autre, on s’est dit pourquoi pas ! Plus qu’une idée c’était une envie. De façon générale on aime la mode et on a toujours considéré que la chaussure était la cerise sur le gâteau du style. 
Jacques : Les chaussures sont un accessoire mais loin d’être un détail. Cela demande une multitude d’opérations pour fabriquer une paire. J’aimais cette idée de réaliser un objet complexe ayant une utilité très simple.

Fabriqué en France, c'est sympa, mais c'est vraiment mieux ?

Déméter : Il y a, en France un vrai savoir-faire et une histoire de l’industrie de la chaussure. A notre petite échelle on essaye simplement de la soutenir pour qu’elle ne disparaisse pas. 
Jacques : Aujourd’hui, à une ou deux exceptions près, les grands noms de la chaussure ne sont plus français. On souhaite simplement redonner ses lettres de noblesses à la chaussure fabriquée en France

Quelles sont les principales difficultés à faire du Made in France ?

Jacques : Proposer un prix correct et concurrentiel ! En faisant du made in France on se doit de proposer des produits irréprochables en terme de qualité et ce n’est pas toujours évident de faire passer ce message auprès des fournisseurs.
Déméter : Il reste très peu d’ateliers qui acceptent de produire en petite série pour de jeunes créateurs inconnus.

Avec le recul, qu'est-ce que vous auriez à dire à quelqu'un avec un projet similaire au vôtre ?

(en chœur) Bon courage !
Jacques : Plus sérieusement à l’heure actuelle on est plus à l’écoute des conseils. On n’a pas assez de recul et d’expérience pour se permettre de donner des conseils.

J'aime beaucoup le design, mais j'ai vu que les semelles étaient collées et non cousues : pourquoi avoir fait ce choix 

Jacques : Les coûts mon ami, les coûts ! Notre volonté est de proposer des chaussures de qualité, au design travaillé avec un prix accessible. En faisant des semelles cousues, en France, les prix de nos chaussures se seraient envolés ! Ca ne nous correspondait pas car dès le début on s’était fixé un prix de vente maximum de 250€ frais de port compris.
Déméter : Initialement on souhaitait proposer des semelles cousues. Lorsqu’on a vu arriver les premiers devis on a rapidement déchanté ! Mais on n'a pas abandonné l’idée donc les semelles cousues finiront bien par arriver !

Une dernière remarque pour la route ?

Vive la chaussure libre !
Note de Geoffrey : la marque est disponible sur leur site et en showroom.
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